Ça fait 3 semaines que je tourne en rond à Lubumbashi. 3 semaines. Ça n’a l’air de rien comme ça et en plus on pourrait se dire : « Non mais elle est rigolote celle-là, elle est payée à rien faire et elle se plaint en plus ! » Et bah ouais. Je suis rigolote et je vous suggère d’essayer de passer 3 semaines à rien faire de vos journées quand tout le monde autour de vous bosse de 8h à 20h. Vous allez vous retrouver à faire des gâteaux tous les matins et lire le seul livre de la bibliothèque tous les après-midis. On verra bien si vous trouvez pas le temps long…
Tout ça pour dire qu’après 3 semaines, ça y est, l’heure du départ a sonné. Aujourd’hui, je remonte dans l’avion direction Malemba. Et là, cher lecteur, tu te dis : « Malemba ? Mais pourquoi faire ? Je croyais que tout était plié à Malemba ! » Et je réponds : « Félicitations ! Tu as bien suivi ! Mais figure-toi qu’il n’y a pas d’aéroport à Lwamba ! » Bon. Certes, qualifier la piste de Malemba d’aéroport, c’est légèrement complètement exagéré mais ne compliquons pas l’histoire dès maintenant. Toujours est-il que pour aller à Lwamba, il faut donc passer par Malemba. Et de Malemba, il faudra encore une demi-journée de voiture. Bah quoi, c’est au moins à 100kms !
J’ai donc refait mon sac avec allégresse et ce matin, je trépigne d’impatience. Mais on ne décolle pas avant midi. Je trépigne donc en silence pour pas énerver tout le monde. Des fois qu’il en reste que je n’ai pas déjà énervés au cours des 21 jours précédents. Je trépigne d’autant plus que je vais rester quelques jours à Malemba. Parce qu’en fait, on a gardé un petit bout de base qui sert de stock et d’hébergement aux gens qui sont en transit entre Malemba, Lwamba et Mukanga. Et que ce petit bout de base est géré par mes copains chauffeurs et que ça me fait bien plaisir de les retrouver.
On finit par y aller. Je remonte d’abord dans le gros coucou qui vole jusqu’à Manono puis dans le tout petit coucou qui me ramène chez moi. Quoi ? Malemba c’est un peu chez moi. D’ailleurs, les gens présents à l’aéroport ce joli jeudi de juillet ne s’y trompent pas. Quand je m’extirpe de l’avion, la foule en délire se met à hurler mon nom. « Anne Li-seuh ! Anne Lis-euh ! » J’te jure… Lennon et Mc Cartney en descendant de leur jet à Paris en 1964, ils ont pas eu le quart de la moitié de mon succès. Les enfants se jettent sur moi, les adultes viennent me serrer la main, Papa P., le responsable de l’aéroport, m’embrasse comme du bon pain…
Là, vous vous dîtes : « Ca y est, on l’a perdue, elle se prend pour Bono, elle va commencer à mettre des lunettes jaunes et se raser le crâne… » Mais je vous rassure. Si la foule m’acclame, c’est pas pour mon talent. C’est parce que tout le monde sait que c’est moi qui ait la clé du coffre. Alors faut raison et cheveux garder et relativiser un peu.
On a beau me promettre que mon élection à la députation est gagnée d’avance, je crains que mes éventuels électeurs n’aient des cœurs d’artichauts. Et que la prochaine Muzungu qui paiera les salaires en dollars sonnants et trébuchants aura, elle aussi, toutes ses chances…
Tant pis pour les lunettes jaunes ! Je suis pourtant sûre que ça m’irait super bien…