Queenstown, c’est mignon, certes, mais c’est un peu la capitale des sports de plein air alors quand l’air est plein d’eau, ça a tout de suite beaucoup moins d’intérêt. Alors, je me dis, on tente le tout pour le tout, filons vers le sud, encore plus au sud, toujours plus au sud. Mais avant d’arriver au bout (du monde), je suis passée par la Karawau Gorge, une superbe gorge (comme son nom l’indique) creusée par la Karawau River (comme on aurait pu s’en douter) et qui elle aussi, a droit à son quart d’heure de gloire dans le Seigneur des Anneaux. Bon, j’ai pas exactement reconnu l’endroit (faut dire que sans GPS, la géolocalisation précise du lieu de tournage était assez difficile à repérer sur la carte du Lonely Planet…) mais j’ai pu voir des cinglés se jeter dans le vide depuis un pont avec un petit élastique enroulé autour des chevilles. Ça aurait presque pu me donner envie mais, heureusement, comme tout en Nouvelle-Zélande, les tarifs prohibitifs m’ont retenue… Mais y avait vraiment que ça, hein, croyez-moi !
La route qui descend jusqu’à la pointe sud de l’île n’est pas bien palpitante. Enfin, si. Elle est magnifique, elle longe des petits cours d’eau bleu fluo, y a des sommets enneigés en toile de fond et les arbres éclatent de couleurs d’automne qui brûlent la rétine. C’est splendide. Oui mais voilà. Deux semaines à ce régime et moi, je trouve ça… mouais, bof, c’est sympa, mais on va pas en faire tout un fromage non plus. Je me filerai des claques.
En parlant de fromage, je traverse la Gibbston Valley, réputée pour les vignes et les caves qui la constellent. Comment ça vous voyez pas le rapport ? Bah si ! Quand on boit du bon vin, qu’est-ce qu’on mange avec ? Et bah oui ! Du fromage ! Et là, comme par hasard, un panneau « Winery & Cheesery » croise ma route. Comme j’en suis pas encore au point au je m’achète des bouteilles de vin à picoler toute seule, je me rabats sur le fromage (et puis le cheddar plastifié, ça va 2 minutes, mais là, j’ai eu ma dose…). Ils se défendent plutôt bien les Kiwis niveau fromage… Ils font du simple crème, double crème, triple crème, triple pontage à la sortie de la ferme ! Alors, j’en profite pour goûter quelques spécialités. Rien qui vaille un bon munster mais de la chèvre qui fleure bon l’herbe. Bah quoi ? Puisqu’on peut pas admirer les paysages, autant se consoler avec un peu de gastronomie !
Alors pour ne rien laisser passer des spécialités locales, je m’arrête à Gore, capitale de la country music (comme son nom ne l’indique pas), où je déguste une mince pie, une tarte remplie de bœuf miroton et recouverte de pâte feuilletée (pour pas que le bœuf miroton déborde). Un peu… gore… mais nourrissant !
Et puis, d’arrêts gastronomiques en pauses photo-sandwich-essence, je finis par y arriver… Au bout du bout du monde… C’est pas compliqué, si je continue tout droit, je tombe dans l’océan (il est froid par ici il paraît) et puis si je me débrouille pour nager jusqu’à la rive d’en face, je risque d’être accueillie fraîchement par des troupeaux de manchots : en face, c’est l’Antarctique. Quelque part entre les deux, un petit confetti français qui se balade : la Terre Adélie. Et je réalise qu’en fait, on n’est pas si au sud que ça.
Je me demande bien comment la Terre fait pour ne pas basculer la tête à l’envers comme un vulgaire Culbuto puisque les trois quarts des terres sont agglutinées au nord… ?
N’empêche que ça a quand même un petit goût de banquise tout ça parce que sur la plage, je croise quelques yellow-eyed penguins. Les plus rares du monde, oui Madame ! Je les regarde jouer à la marche de l’empereur, se curer les dents mutuellement (oui, quand t’es un pingouin, t’as besoin que quelqu’un vienne te picorer le fond de la gorge parce que t’as clairement les bras trop courts pour tenir un cure-dents…) et chantonner des berceuses pour leurs bébés. Ils sont kromeugnons… En plus, sur leur plage, c’est pas facile, y a des troncs d’arbres pétrifiés depuis des millions d’années, ça leur facilite pas la tâche.
Alors voilà. Maintenant que je suis là, au bout du bout du monde, je ne peux plus aller plus loin. Et force est de faire le constat suivant : si je ne peux plus aller plus loin… il me reste plus qu’à revenir ! A partir de maintenant, chaque étape me rapprochera du point de départ. Houhou… Drôle d’impression.
Alors je reste un peu là, en équilibre, au bord de la falaise, à écouter les vagues qui s’écrasent 20 mètres plus bas, je regarde à gauche, c’est le Chili, à droite, c’est l’Argentine, je respire un bon coup et je tourne les talons… Heureusement, il me reste encore une bonne moitié du monde à arpenter avant de rentrer !
Photos ici.