C’est une maison bleue…

Comme on est samedi matin, en quittant Santa Cruz je fais un petit tour par le marché. Le Farmers Market. Les producteurs des environs viennent y vendre leurs fruits et leurs légumes et il paraît que c’est à ne pas louper alors… Et en effet, c’est bien sympa. Déjà tout le monde fait goûter tout son étalage. C’est qu’il est hors de question d’acheter à l’aveuglette ! Bon, y a jamais qu’une dizaine de stands mais je me laisse tenter et une demi-heure plus tard, je repars avec, sous le bras, une barquette de framboises, quelques tomates, une baguette aux céréales (si, si, une VRAIE baguette) et un pot de ceviche. Il faut dire que mes occasions de manger du poisson sont plutôt rares (et puis, je veux pas vexer Flipper…).

A midi, je m’arrête donc à Pigeon Point où je déguste mon pique-nique de reine… Ah ! du vrai pain, du poisson frais, des tomates ultra goûtues et des petites framboises pour couronner le tout… qui a dit que je devais me farcir un régime déprimant ?

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Et après les kilomètres d’asphalte plutôt déserts de ces derniers jours, je me retrouve soudain dans les embouteillages qui annoncent San Francisco. En fait, les embouteillages sont plutôt dans l’autre sens. En ce début d’après-midi, les gens quittent la ville pour aller à la plage. Du coup, Flipper et moi on se débrouille pas trop mal et on arrive à notre adresse dans le quartier de Haight Ashbury. Parce qu’on est comme ça nous : on se dit que quitte à passer un peu de temps à San Francisco, on va pas aller se perdre en banlieue et encore moins se prendre un motel. Non, non. On s’installe directement au cœur de l’action !

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Bon, en fait, j’ai un peu cherché sur internet comment on pouvait faire et j’ai fini par trouver quelques adresses dans San Francisco où se garer la nuit ne gêne pas les voisins et où, si on est discret, on ne se fait pas déloger. Parce qu’il ne faut pas croire ! Passer la nuit dans son véhicule est toujours illégal ! Mais noyés dans le nombre de voitures de la ville, je pense qu’on a toutes nos chances.

Une fois installée, je m’occupe du plus pressé : la lessive. Et une fois que j’ai des affaires propres, je prends le chemin de la piscine. Non pas que je meurs d’envie de péter mon score au 100 mètres papillon… non. Disons plutôt que ça fait bientôt 4 jours que je n’ai pas vu une douche : il est grand temps de se décrasser ! Sauf que pas de bol : la piscine est déjà fermée. Je suis bonne pour revenir le lendemain matin. Parce que 5 jours sans shampoing… beurk !

Du coup, à 9h pétantes en ce dimanche matin, je suis à la piscine. Et c’est rigolo, y a que des Asiatiques dans le bassin. Même la maître-nageuse est asiatique ! Le temps de faire mes 40 longueurs (bah oui, tant qu’à être là, autant en profiter !) et d’user et abuser du savon sous la douche, il fait un soleil radieux quand je ressors. Par-fait !

Je me mets donc en route pour un petit tour en ville. Je suis déjà venue à San Francisco il y a 3 ans,  je me concentre donc uniquement sur ce qui me fait vraiment plaisir de voir ou de revoir. Je commence par une petite balade dans Castro pour arriver devant… une maison bleue. Oui mais pas n’importe quelle maison bleue. LA maison bleue. Celle adossée à la colline, où on ne frappe pas, ceux qui vivent là ont jeté la clé…

C’est plutôt drôle parce que, à part cette petite plaque collée sur le mur, la maison n’a rien de vraiment spécial. Elle ressemble à toutes les autres dans cette rue. Et personne ne semble d’ailleurs vraiment s’y intéresser. A part moi. En tout cas, ça suffit à me coller la chanson dans la tête pour la journée ! Quelques rues plus loin, je grimpe dans un vieux street car poussif qui m’emmène jusqu’au Ferry Building. Là, on peut, évidemment, prendre le ferry, mais surtout… manger ! Y a plein de stands de bouffe tous plus appétissants les uns que les autres… Je craque pour un mixed salumi cone, un petit cône en papier dans lequel il y a du jambon, de la pancetta et tout un tas d’autres charcuteries italiennes en petits morceaux… mmmmh ! dé-li-cieux !

Un peu plus loin sur les docks, je tombe sur le village de l’America’s Cup. Si je comprends bien tout le remue-ménage autour, ça doit avoir lieu en ce moment. Moi, j’y connais pas grand-chose en compétition de voile : pour moi, la Coupe de l’America, ça a lieu en mer. Depuis les docks de San Francisco, je vois pas bien l’intérêt. Du coup, je continue mon chemin jusqu’au fameux Pier 39. Aux croassements (si, les otaries, ça croassent) et à l’odeur, je retrouve sans peine les otaries. Avachies en plein soleil, elles se donnent en spectacle sous les flashs de la bonne centaine de touristes qui se pressent sur le dock. Et tandis que je suis là, à contempler bêtement ces grosses quenelles, mon regard est attiré par quelque chose qui bouge dans la baie. Et qui bouge sacrément vite ! Deux immenses catamarans sont en train de finir une régate… la Coupe de l’América ! Ils sont suivis de toute une flottille de bateaux qui essaient tant bien que mal de les suivre. J’en ai jamais vu d’aussi grands ! Et surtout, jamais qui allaient aussi vite ! A peine le temps de les voir traverser la baie et hop, c’est fini, ils rentrent au port. Et ben dis donc… drôlement impressionnant !

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Et puis, parce que aller à San Francisco et ne pas traverser le Golden Gate Bridge ça serait un peu comme aller à New York et ne pas traverser le Brooklin Bridge, je retourne louer un vélo pour passer de l’autre côté du pont. Je dis « je retourne » parce qu’il y a 3 ans, on avait fait la même chose. Sauf qu’on était parties assez tard et qu’on avait fini la balade à la nuit tombée. Là, j’ai toute l’après-midi devant moi. Mais pour autant, je n’ai pas tiré de leçons du passé : comme il y a 3 ans, il y a un vent à décorner les bœufs et comme il y a 3 ans, les côtes qu’on avait eu tant de mal à grimper sont toujours là ! Par contre, pas comme il y a 3 ans, en arrivant au pied du pont… rien. Pas de pont. Pas même l’ombre du pont. San Francisco s’est embrumé et le pont a disparu. Même une fois dessus, je ne vois pas le sommet du premier poteau ! Le fameux brouillard de San Francisco… que je n’avais pas vu il y a 3 ans ! Bah là, j’y ai droit dans toute sa splendeur ! La corne de brume retentit sans arrêt, il fait un froid de canard et on n’y voit goutte !

Enfin ça, c’est du côté de San Francisco. Parce que dès que j’arrive du côté de Sausalito (de l’autre côté, quoi), d’un coup, tout s’éclaircit, le ciel redevient bleu, le pont rouge et c’est magnifique… De la vraie carte postale. Avec la brume qui s’écoule de derrière la colline, qui s’agrippe dans les haubans du pont et le soleil qui fait briller la baie… J’ai mal aux cuisses (oui, je sais, c’est une balade de débutants, je ne suis pas vraiment une adepte de la petite reine…) mais ça valait le coup !

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Reste quand même une dernière côte à grimper pour rejoindre le port… ce que je fais en pestant. A l’arrivée, j’ai 5 minutes avant le départ du prochain ferry. Parfait, juste le temps d’engloutir un smoothie mangue-passion et hop !  me voilà sur le pont à essayer de me réchauffer au soleil. C’est qu’on est en Californie du nord maintenant ! Et il fait pas bien chaud ! Et ça s’arrange pas quand le ferry retourne dans la purée de pois pour rejoindre San Francisco. Du coup, c’est quasiment frigorifiée que je rends mon vélo. Ce qui me donne une bonne excuse pour filer chez Boudin.

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Et non, Boudin ne fait pas du boudin. Sinon j’irais pas, j’aime pas ça. Boudin fait du pain. Et du très bon pain même. Avec ce petit goût qui pourrait presque faire croire que ça vient de chez nous. Et pour ne pas manger du pain sec, Boudin le remplit avec de la clam chowder. De la chaudrée de palourdes, quoi.

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Une fois réchauffée et le ventre plein, la nuit tombe. Il est donc temps de retrouver Flipper qui m’a attendu sagement toute la journée dans son coin, impatient de reprendre la route. Demain, on attaque la Californie du nord…

Photos ici.

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Nous n’verrons pas le Cotopaxi…

Ce matin, je me lève et je m’habille sans faire de bruit. Il est 6h, mes colocs dorment encore… Mais pour moi, c’est pas l’heure de traîner. Ce matin, je pars voir le Cotopaxi, le volcan qui domine Quito à près de 5897m. Bon, pour l’heure, j’entends surtout la pluie qui tambourine sur les tôles ondulées du toit…

J’ai rendez-vous devant l’hôtel avec 3 Belges, Roxanna, Steven et Jorun, mes co-aventuriers du jour, et Marco, notre guide. On commence tout de suite par les choses sérieuses, on se jette sur un pantagruélique petit déj… Salade de fruits frais, pancakes, sirop d’érable… pas très équatorien tout ça mais tellement bon ! Et puis, le temps de monter les vélos sur le toit de la jeep et en voiture Simone ! Ah oui… je vous ai pas dit : le Cotopaxi, on va y monter à pieds et redescendre à vélo, c’est bien plus rigolo…

Mais avant de se lancer dans le grand n’importe quoi, on a d’abord une grosse heure de route pour rejoindre l’entrée du parc national Cotopaxi. Tout le long du trajet, Marco nous cite tous les volcans qu’on est censés voir et qui sont bien emmitouflés dans les nuages… Les essuie-glaces battent la cadence sans discontinuer, nous, on sert les dents, ça promet… Après un énième virage, Marco, qui pourtant nous promet depuis le début que le Cotopaxi va être dégagé, finit par abandonner : « Non les gars, désolé, c’est pas aujourd’hui qu’on verra le sommet… ». Bon. Bien. Bah… de toute façon, maintenant qu’on est là, on va quand même grimper dessus, hein ! Encore une grosse demi-heure de piste après être entrés dans le parc et enfin, nous y voici ! On est au pied du volcan. Et il est dans la purée de pois. Mavéis bon, au moins, il a arrêté de pleuvoir…

Alors que ceux qui croient que ça y est, j’ai viré accro aux sommets et aux crampons, se détendent… Aujourd’hui, je ne grimpe pas au sommet. Je n’essaye même pas. On monte juste jusqu’au glacier, y a à peine 350m de dénivelé depuis le parking. Quoiqu’à plus de 4500m, ça compte ! Et dans les petits graviers de lave qui roulent sous les pieds aussi ! D’ailleurs, on va bien mettre une heure et demie mais au bout du compte, on se retrouve nez à nez avec une grosse crevasse qui vient mourir devant nos pieds… wow ! énorme ! Et en plus, on a touché les 5000m ! Mais comme il se met à grêler (oui parce qu’à 5000m, il ne pleut pas, il grêle…), on reste pas longtemps, on fait demi-tour et on va se mettre à l’abri au refuge qui sert de camp de base à l’ascension du sommet. Et là, c’est la meilleure partie de la journée : on a droit à un chocolat chaud brûlant qui nous fait presque oublier qu’on a même pas aperçu ce foutu volcan…

Mais la journée n’est pas finie ! Il nous faut encore redescendre au parking et de là, dégringoler toute la montagne jusqu’au lac Limpiopungo, ou tout du moins ce qu’il en reste après que les éruptions successives aient remplies le trou. Et oui ! Parce que le Cotopaxi est un volcan actif, messieurs-dames ! Et qu’il entre en éruption tous les 100 ans. A peu près. Et là, il se trouve qu’il a pas loin de 28 ans de retard… Ça pourrait donc bien arriver aujourd’hui… Mais comme on ne peut pas non plus tout le temps avoir la poisse, on va s’épargner ça pour cette fois. Non, cette fois, on va juste se concentrer sur les freins arrières de nos montures qui sont plus que fatigués. La descente de la piste gravillonnée et défoncée pendant 45 minutes les doigts crispés sur les freins, la tête rentrée dans les épaules et des sueurs froides nous coulant dans le dos chaque fois que nos roues arrières s’approchent un peu trop près du ravin sera un vrai cauchemar… Et encore moi, j’ai pas le mal des montagnes contrairement à mes petits camarades qui eux, ont la tête à 2 doigts d’exploser et les joues pleines de feuilles de coca ! Non vraiment, ce fût un véritable enchantement ! Et pourtant, juste au moment où on remonte les vélos sur la voiture et où on s’apprête à mettre les voiles, un coup de vent bienheureux nous dévoile un tout petit bout du volcan. C’est magique : la lave rouge, les roches grises, la glace étincelante… pfff ! qu’est-ce que ça doit être quand le ciel est bleu !

Et puis c’est pas le tout mais il commence à faire faim ! Marco nous ramène en ville et nous emmène déjeuner dans un petit resto où on tombe sur nos assiettes comme si on n’avait pas mangé depuis 15 jours. Un vrai régal ! Du coup, on s’autorisera même une micro-sieste sur le trajet du retour…

Et puis, comme d’habitude, la nuit tombant, on se retrouve cantonnés à l’hôtel mais après une journée pareille, on ne fait pas durer la veillée très tard…

Le lendemain, je décide que puisque je suis en Equateur, je vais aller le voir. L’équateur. A 22kms de Quito se trouve la cité de la Mitad del Mundo (la moitié du monde pour ceux qui n’ont pas mon niveau en espagnol) où est matérialisée la fameuse ligne. Ça fait partie des « à ne pas manquer » du Lonely. C’est donc que ça vaut le coup… et puis ça a intérêt parce que je mets pas loin de 2 heures pour y aller. Bon en même temps j’avais le choix : 2 heures et 50 centimes en bus ou 30 minutes et 40 dollars en taxi. Des fois, dans la vie, faut faire des choix. Bref, je manque louper l’arrêt (en même temps, tout le monde monte et descend n’importe où n’importe comment, parfois même sans que le bus ne s’arrête alors…) et je me retrouve sur un énorme rond-point au milieu de nulle part. Et là, je vois ça…

Alors je me dirige vers cette étrange sculpture, je paye mes 3 dollars d’entrée et… rien ! Y a rien d’autre ! Enfin si. Toute une panoplie de boutiques de souvenirs toutes plus kitsch les unes que les autres et deux restos déserts et hors de prix. Je hurle au scandale. Dans ma tête. Et d’un pas furieux, je prends la direction de la sortie. Tout en me demandant comment je vais bien pouvoir attraper le bus pour rentrer. Heureusement, en arrivant sur le rond-point, un bus s’arrête et il va dans la bonne direction : sauvée ! Là, allez comprendre pourquoi, le trajet retour me coûte 40 centimes contre 15 à l’aller. Désolée, j’ai pas compris les explications du type qui collecte les sous… Et puis après ça, je reprends encore un autre bus qui me ramène en centre-ville. Il est 13h, je viens de perdre 4 heures de ma vie… Et je suis franchement agacée. Du coup, je me venge, je vais manger une bonne grosse pizza pleine de fromage et d’origan ! Et na ! « A ne pas manquer » ? Pfff… j’t’en collerais du « à ne pas manquer », moi… Histoire de ne pas partir fâchée, j’irai quand même visiter la Basilica del Voto Nacional, une des plus grandes églises de la ville, ornée de tortues et d’iguanes… une petite touche locale.

Et puis je trouve refuge dans les canapés de l’hôtel pour laisser filer la fin de l’après-midi en attendant d’aller prendre le bus. Quito, c’est déjà fini. Cette nuit, direction le sud. Demain matin, je serai à Cuenca.

Photos ici.

Kratie

Bon. Bah dans la vie, des fois, tout ne se passe pas exactement comme on l’avait prévu, hein !

Arrivée à Kratie, je me suis rendue au CRD (Cambodia Rural Development) qui est censé t’aider à organiser des séjours en homestay et accessoirement t’expliquer comment t’y rendre tout en parcourant le « sentier de découverte du Mékong ». Censé. Parce qu’en fait, ils ont pas trop envie de bosser là-dedans. Déjà, ils t’expliquent que comme tu es toute seule, ça va te coûter un bras et une jambe. Comme tu es curieuse, tu pousses un peu et tu leur demandes quel est le cours actuel de chacun de ces membres. Bon, là, le gars, il réfléchit. Il se demande où il peut mettre la barre pour que tu lâches l’affaire rapidement. Alors très convaincu, il te balance « 100$ pour le transport et 20$ la nuit en homestay ! ». 20$ la nuit, OK, passe encore si y a une piscine et un jacuzzi et un masseur. Mais 100$ le transport !!! Il a fumé un « happy » tuk-tuk ou quoi ? Bah oui mais Madame, la jeep faut la ramener après, donc faut payer l’aller et le retour. Bon, là, il t’explique que si tu veux moins cher, tu peux aussi louer un vélo… C’est c’làààà oui ! Les vélos asiatiques n’ont pas de freins (une spécialité du coin), et le gars, il croit que toi et tes 25kgs de sacs vous allez aller pédaler sur plus de 200 bornes en 3 jours… Mais bien sûr ! Et la marmotte…

Bref, tu comprends vite que ton super plan tombe à l’eau. Mais tu ne t’avoues pas vaincue ! Tu lui demandes quand même si y a pas des trucs sympas à faire sur une journée. Ah bah là oui ! Vu qu’il aura rien besoin de faire, là, il te sort des tas d’itinéraires à pied, à vélo, bref, tu vas quand même pouvoir t’occuper.

Alors pour commencer (et vu qu’il est déjà 16h…), tu décides d’aller visiter Koh Trong (ça y est, toutes les îles s’appellent déjà Koh kekchoz, on se croirait en Thaïlande). Alors tu prends le ferry (enfin, la barge), tu files 2$ à la fille qui surveille les bicyclettes et hop là ! tu te mets à pédaler joyeusement… les 50 premiers mètres. Parce qu’au bout de 50 mètres, une certaine partie de toi te rappelle douloureusement que t’as déjà fait du vélo la veille et qu’en plus de pas avoir de freins, ces satanés tas de ferraille n’ont pas non plus de ressorts (ou de trucs qui pourraient jouer le rôle d’amortisseurs…) et que tu ne roules pas sur une belle route bien bitumée mais sur des pistes en terre pleines de nids de poule. J’ai beau être matinale… j’ai fort mal.

Mais qu’importe ! Tu n’es pas une chochotte, tu ne vas pas te laisser abattre par 2 fessiers endoloris ! Alors tu pédales, le nez au vent et t’essayes de ne pas te vautrer élégamment pendant que tu fais coucou à tous les enfants qui te courent après en criant « Hello ! Hello ! ». Pour un peu, tu te prendrais pour la British Queen. (M’étonnerais que la British Queen s’use la santé à vélo en suant à grosses gouttes mais bon…)

La dernière traversée de la barge étant à 17h30 (s’agirait de pas la louper quand même !), tu rends ta monture à la fille qui a déjà fermé la boutique et tu assistes à un magnifique coucher de soleil orange fluo derrière Koh Trong tout en sirotant un p’tit jus de citron pressé… Ha ! Des fois, j’te jure, c’est pas facile cette vie…

Le lendemain matin, t’as oublié que tu peux plus vraiment t’asseoir t’as décidé de te la jouer warrior ultra. Tu reloues un vélo (bah oui) et tu pars pour une boucle de 50kms. 50kms. 50. Oui, oui. Bon, à l’hôtel, le gars t’a dit de prendre un mountain bike dans la cour. Alors t’as choisi le plus beau. T’as testé les freins et t’as bien réglé la selle. Et tu pars. Fière. Et en plus, t’as même pas mal. Enfin presque. Tu suis donc d’abord la rive est du Mékong. C’est joli, le fleuve est tellement large qu’on dirait la mer, tout le long il y a des maisons sur pilotis et y a plein de petits îlots qui affleurent (normal, on est en saison sèche, le niveau de l’eau est au plus bas). Au fur et à mesure de la matinée, les perles de sueur qui apparaissaient délicatement dans ta nuque se transforment en rivière qui dévale le long de ta colonne vertébrale. T’as beau faire des pauses tous les quarts d’heure, l’ombre se raréfie (tiens donc ? mais comment cela se fait-il ?) et tu te demandes qui a allumé les radiateurs. Tu pédales plus le long du Mékong, tu pédales dans un four. Heureusement, tu sais que pas très loin, il y a la barge qui va te transporter sur la rive ouest et que tu vas pouvoir te rafraîchir sur l’eau. Hum, hum… Déjà, tu loupes 2 fois « l’embarcadère »… Faut dire qu’en fait, y en a pas. Y a juste une bande de sable sur laquelle la barge s’échoue, on descend une planche pour que les motos puissent monter, on charge tout ce qui est humainement possible de charger et voilà. Et puis, dans le coin, ça parle pas vraiment anglais (et mon niveau de khmer est plus que lamentable) alors autant vous dire que pour demander son chemin, c’est tout un poème. Mais bon, j’arrive quand même à monter à bord. Autant vous dire que je suis l’attraction du siècle. Une touriste ? A vélo ? Sans moteur son vélo ? Et avec des vrais freins et même des boutons pour passer les vitesses ? Et en plein cagnard ? Complètement dingue… Y a même un monsieur qui m’offre des légumes (un truc qui ressemble à un navet mais tout blanc et qui se mange cru après avoir pelé la première couche pleine de terre). Ça les fait hurler de rire de voir que je ne sais pas comment on épluche ce truc alors tout le monde me montre comment faire, on rigole, tout le monde regarde si je ne vais pas tout cracher par-dessus bord mais non, je sais me tenir et puis, c’est plein d’eau (ça, j’en ai bien besoin) et ça n’a pas vraiment de goût en fait.

Après ce petit intermède divertissant, je repars dans l’autre sens. Là, la route goudronnée a fait place à une piste en terre et j’ai beau faire semblant de ne rien entendre depuis ce matin, mes fesses commencent à me maudire d’avoir choisi la boucle de 50kms plutôt que la balade de 10kms. Mais de toute façon, je suis coincée sur la rive ouest, j’ai pas le choix, faut bien revenir au point de départ (principe de la boucle, oui, je sais, merci). Heureusement, des tas d’enfants me donnent un prétexte pour m’arrêter régulièrement et chanter des comptines ou faire des photos. Je pense qu’on n’est pas loin de 1 adulte (au-delà de 15 ans je veux dire) pour 10 gamins. Ils ont pas la télé ou quoi ? Et ça joue dans la poussière, ça court après les poussins, ça joue à la guerre avec des épées en bambou, à la marchande ou à la coiffeuse mais surtout, ils ont les plus beaux sourires (un peu édentés parfois) que j’ai vus jusque là. Un vrai bonheur. Alors moi, je continue à jouer à la reine d’Angleterre.

Mais toutes les bonnes choses ont une fin. Je finis par trouver la barge qui me ramène sur l’autre rive et comme j’en peux plus le soleil est déjà en train de se coucher, je n’ai plus le temps d’aller voir les fameux dauphins. Pas grave, je pourrais aller les voir au Laos. Et oui ! Parce que le Cambodge c’est (déjà ???) fini ! Demain, mission « traversons la frontière et entrons au Laos ». Premier arrêt, les 4000 îles. Rien que le nom, ça a l’air bien, non ?

Dernières photos du Cambodge, ici.

Kompong koi ?

Le hasard du voyage fait que, sur les conseils d’un Australien avec qui j’ai discuté 10 minutes montre en main, j’ai décidé de ne pas repasser par Phnom Penh pour gagner le nord-est du pays mais plutôt de faire un stop à Kompong Cham.

Oucétidonkecéssa Kompong Cham ? Bah… quelque part au bord du Mékong entre Siem Reap et Kratie (qui est donc, vous l’avez deviné, la prochaine étape).

Et… koidonkaphère à Kompong Cham ? Bah… il paraît qu’il y a un pont en bambou. Voilà.

Mais bon de temps en temps, faut se laisser porter. De toute façon, Phnom Penh, j’ai déjà vu (et puis là, tout est fermé parce que c’est enfin les funérailles royales) alors, si le gars dit que Kompong Cham, ça vaut le coup, pourquoi pas ?

Du coup, j’ai pris le bus pour Kompong Cham. 5 heures sur le papier, 7 dans la réalité mais ça, je commence à connaître la musique. Mon nouveau credo ? Ne jamais laisser passer une occasion d’aller faire pipi, tu sais pas quand sera la prochaine. (Oui, le voyage, ça rend poète n’est-ce pas ?)

Et puis, finalement, les trajets en bus, c’est aussi un moyen d’observer certaines coutumes locales. Au Cambodge dans les bus, les chauffeurs ont toujours plein de petits sacs en plastique qu’ils distribuent généreusement parce que les Cambodgiens sont médaille d’or des malades en transport. Les adultes arrivent à peu près à se gérer mais alors les enfants… c’est un cauchemar… Faut rien laisser traîner par terre (même pas tes pieds), tu sais jamais ce qui va arriver… L’autre truc qui met des nerfs à rude épreuve c’est justement les enfants. Il doit y avoir une règle qui dit « Pas besoin d’acheter de ticket pour les moins de 10 ans ». Parce que tous les enfants de moins de 10 ans sont assis sur les genoux de leurs mères. Et s’ils sont plusieurs, c’est pas grave, on entasse. Si t’es assis sur le siège d’à côté, ne crois pas que la mère va faire attention à ce que ses rejetons ne s’étalent pas sur toi. De toute façon, elle est bien trop occupée avec tous ses petits sacs en plastique… Mais là encore, tu peux supporter. Le meilleur moment c’est quand y en a un qui se met à pleurer (oui parce que y en a, ce sont vraiment des mini-bébés et les mini-bébés, ça pleure et des fois, pendant trèèèèèèès longtemps, on n’y peut rien). Et là, ce sont les dominos. Ça se met à brailler dans tous les sens, les mères parlent donc plus fort pour se faire entendre (quoique le niveau sonore de base soit déjà bien suffisant) et le tout est, bien sûr, couvert par les clips de karaoké qui défilent pendant tout le voyage. Heureusement, t’as ton iTruc et tes écouteurs bien enfoncés dans les oreilles, tu tentes de survivre.

C’est comme ça que je suis arrivée à Kompong Cham. Fatiguée. Mais bon, je ne suis là que pour 24 heures, on va pas se laisser abattre par 3 pleurnichards et 2 vomis, hein ?

Alors après avoir posé mes affaires dans une chambre d’hôtel sans fenêtre (oui, avec, c’est 5$ de plus, y a pas de petites économies ma bonne dame !), et avalé un sandwich au contenu non identifié (la dame du marché me parlait khmer… j’ai rien compris), j’ai loué un vélo et je suis partie à la recherche du pont en bambou. Vous ai-je précisé qu’il faisait 45°C ? Vous avez déjà fait du vélo dans un sauna ? Bah, c’est pareil…

Bon, heureusement, Kompong Cham c’est plat. Et le pont en bambou était facile à trouver. Ce drôle de pont relie la ville à une petite île sur le Mékong qui s’appelle Koh Paen. A la saison des pluies, on ne peut rejoindre l’île qu’en bateau. Mais à la saison sèche, chaque année, les habitants construisent à la main un pont en bambou qui, de loin, ressemble à un pont en allumettes. Sur l’île, quelques petits villages, des champs, des poules et des carrioles à chevaux. Et surtout, des dizaines d’enfants qui jouent dans la poussière, te font d’immenses sourires et se mettent en rang pour te taper dans la main quand tu passes sous les yeux de leurs parents qui rigolent en criant « Hello ! ». Tout ça, à l’ombre des bananiers et des bambous (bah oui, faut bien les trouver quelque part pour tricoter le pont) et sous le regard vaguement surpris des vaches qui font la sieste au bord du chemin. Bref, une super balade.

En fin d’après-midi, j’ai repris le petit pont en bambou (je sais pas comment il tient et je veux pas savoir mais n’empêche que quand tu croises une voiture, ils plient dangereusement les bambous…) juste au moment où le soleil se décidait à aller se coucher derrière le Mékong sur lequel des enfants faisaient une course à la rame dans des bassines : fan-tas-tique…

Comme quoi, de temps en temps, faut écouter les Australiens et pas hésiter à changer son fusil d’épaule.

Le lendemain, j’ai repris le bus (encore ??? oui, quand on aime…) mais cette fois, sur le papier, seulement pour 3 heures. Et étonnamment, 3 heures aussi dans la vraie vie. On ne peut jamais savoir…

Direction Kratie (prononcez Kra-tché) qui va me servir de camp de base pour organiser la remontée du Mékong jusqu’à la frontière laotienne. Là, le plan, c’est de se dégoter 1 ou 2 nuits chez l’habitant, de trinquer à l’alcool de riz, de faire des balades à vélo, en bateau et surtout d’aller voir les dauphins de l’Irrawaddy…

Photos ici.

AL sur le Dos du Dragon

On dirait la version trash des aventures de Martine, non ? AL crache un cafard, AL chez les Chinois bastonneurs, AL et le dragon…

Bon, plus sérieusement, c’est quoi cette histoire de dragon ?

Vous vous souvenez que maintenant, je suis à Guilin (vous vous souvenez, hein ?). Guilin, dans le Guang de l’ouest, célèbre pour sa campagne et ses paysages de pics karstiques émergeant du brouillard. Ah oui, ici, pas la peine de se demander de quel côté le soleil se lève, y a pas moyen de savoir. Pour ceux qui ne sont pas géologues, c’est quoi un pic karstique ? Et bien, très simplement, c’est la roche qui a été façonnée par l’érosion due à l’acide carbonique dégagé par la réaction des eaux de pluie au dioxyde de carbone ambiant. En gros, il pleut, ça bouffe la roche qui est calcaire et paf ! ça fait des chocapics ! de grandes fissures qui s’élargissent avec le temps, finissent par former des trous de gruyère et puis au bout d’un moment, le plafond s’effondre (bah oui, y a plus rien en dessous) et il ne reste que les croûtes du gruyère pics karstiques. Et les eaux pluviales étant ici moins riches en acide carbonique que le sol, la base des pics continue à s’éroder lentement mais sûrement. Voilà. Et y en a pas mal dans le coin. Y en a pas mal dans toute cette partie de l’Asie du Sud-Est puisque c’est le même genre de phénomène qui a créé la baie d’Halong au Vietnam, mais là n’est pas le sujet, nous en reparlerons pas plus tard que dans 15 jours (hiiiiiiiii !!).

DONC… tous ces pics karstiques nappés de brouillard forment un paysage enchanteur et poétique chanté par… les poètes (pardi !) depuis quelques milliers d’années. Mais comme la poésie n’a jamais fait vivre son homme (non, jamais), les types du coin (qui sont pour la plupart issus des minorités Zhuang et Yao) ont fait pousser du riz à flanc de pic karstique (véritable prouesse agricole et je m’y connais !). Ils ont donc étagé les rizières, parfois jusqu’à près de 1000 mètres d’altitude, en parsemant le tout de villages on ne peut plus bucoliques. Quand il pleut en été (… bah oui, c’est comme ça, j’y peux rien, ici, il pleut en été), les rizières sont inondées et le soleil se reflète sur les terrasses, donnant l’impression des écailles sur le dos d’un dragon D’OÙ… les rizières en terrasse du Dos du Dragon !! Tadaaaaa !!

Pfiou ! Toute cette mise en scène pour vous raconter que je suis montée dans un minibus pour aller voir des rizières dans un trou paumé chinois…  Enfin, que je suis allée « voir »… j’ai fait 5 heures de minibus (oui, j’ai fait ma touriste sur ce coup, j’ai pris un tour organisé), ai rencontré des femmes Yao (qui ne se coupent les cheveux qu’une fois dans toute leur vie, pour leur 18 ans, et qui ont de très jolies coiffures), ai grimpé en haut d’une colline dans la bouillasse pour… ne rien voir. Enfin, rien. Quoisi rien. Brouillard à couper au couteau et bon petit crachin breton. Pour vous donner une idée, voilà ce que j’étais censée admirer :

rizières

et  voilà ce que j’ai vu…

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No comment.

C’était plutôt rigolo de voir les Chinois grimper jusqu’au sommet de la colline et se prendre en photo devant un poster géant de ce qu’ils auraient dû voir. Y a quand même le photographe officiel qui te demande 2 yuans pour te laisser te prendre en photo devant une grande toile décolorée et fripée avec ton propre appareil photo. Business is business. Et là, c’est la low season alors faut pas se laisser aller !

Bon. Au moins j’ai rencontré des gens sympas : L. la guide chinoise, F. et S. un couple sino-américain en lune de miel (j’ai un truc avec les lunes de miel je vous dis), S. australienne et Y. espagnole (avec un anglais plein de « o » et de « a » à la fin des mots) et on s’est bien marré. En fait, la meilleure partie du tour finalement, c’est quand sur la route du retour, on s’est arrêté acheter des mini-clémentines et qu’on s’en est empiffrés jusqu’à Guilin. Oui je sais, d’habitude, j’aime pas ça les clémentines. Mais là, elles sont vraiment toutes petites, elles s’épluchent toutes seules et y a pas de « blanc » dessus. Enfin avec tout ça, le dragon, hein… Martine repassera !

Mais comme je ne m’avoue pas vaincue, aujourd’hui j’ai décidé d’aller à Yangshuo faire du vélo le long de la rivière Li. J’ai donc pris le bus, loué mon petit vélo, demandé conseil au gars pour trouver une boucle sur terrain plat (oui, je suis une feignasse, j’assume, mais je fais du vélo quand même), attaché mon casque et en avant ! La balade était impeccable, très jolie malgré le ciel tout gris et je suis quand même restée 4 heures sur mon vélo donc… je ne peux plus m’asseoir… mais c’était super. Enfin, j’ai touché de la pédale du doigt la campagne chinoise. Du bout du doigt mais quand même.

Et enfin, j’ai trouvé une ville chinoise vraiment chouette. Yangshuo, c’est franchement touristique mais ça se comprend : c’est vraiment hyper joli. Le centre-ville est entièrement piéton avec de jolies maisons en bois et la rivière s’enroule autour des pics à perte de vue. J’ai failli pousser jusqu’à la balade en radeau en bambou sur la rivière Li mais il était déjà tard et grelotter pendant 1 heure même en regardant défiler les pics karstiques, ça ne me tentait pas tant que ça. Alors à la place, j’ai testé pour vous le Mc 培根和奶酪.

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Pas de quoi s’évanouir et franchement, ça vaut pas une bonne assiette de fried dumplings, mais bon, étude sociologique oblige…

Et puis je suis donc rentrée à Guilin, préparer mon sac pour ma dernière étape chinoise (déjà ???), Nanning, la ville où je dois me débrouiller pour obtenir un visa pour le Vietnam.

Photos ici.

Avis de recherche : Si quelqu’un trouve un clavier et un bouton « envoi » bien distinct, qu’il n’hésite pas à me faire signe, je connais quelqu’un qui a perdu le sien…

Delhi ByCycle

Bon, ça va faire 3 jours que je suis à Delhi et à part régler mes petits tracas administratifs, qu’ai-je donc fait pour mériter ça ? (là, si quelqu’un voit l’allusion, je lui tire mon chapeau) pour occuper mes journées ?

Ben tout d’abord, j’ai fait connaissance avec mes colocs. J’ai notamment dîné avec G., un français en tour du monde (original me direz-vous…) après 8 ans d’expatriation à Dallas (la classe…) et avec qui on s’est rué chez Pizza Hut (parce qu’on n’arrive plus à faire la différence entre le masala et le butter masala).

Je suis allée visiter le tombeau de Humayun, « le site le plus merveilleux de Delhi » dixit nos Lonely amis. Bizarrement, ça m’a fait penser à un autre truc… Enfin, vous me direz ce que vous en pensez.

J’ai observé la faune locale… et découvert que les perroquets, ça ne vit pas qu’au zoo.

Et puis ce matin, je me suis dit qu’il fallait prendre son courage à 2 mains et plonger dedans pour de vrai. Et me voilà partie pour un tour de la ville à vélo. Rendez-vous donné à 6h30 (Hein ? Quoi ? 6h30 ? Du matin ? Vous rigolez ? Non ? Ah bon…) parce qu’après « la circulation est trop dense et ça devient compliqué d’apprécier la balade » (sans blague…). Première surprise : quand tu mets les pieds dans la rue à 6h du matin, 1/ y a personne donc y a pas de bruit et c’est suffisamment rare pour être signalé, 2/ il fait froid… genre vrai froid (comme qui dirait)… genre il fait 15°C (bah si, pour la région, c’est froid).

Bref, c’est un peu la galère pour trouver un rickshaw mais je finis par en trouver un encore tout endormi et tout emmitouflé dans une grande couverture en laine qui se trompe de 100 roupies dans le prix de la course parce qu’il est encore trop tôt donc je saute dedans !

Le point de ralliement des malades du vélo est au fond d’un parking tout noir et plein de chiens qui aboient… Bizarre… Mais les vélos sont bien là, les guides avec leurs K-way oranges aussi et à 6h45, tout le monde est en selle et c’est parti mon kiki ! Non, sans rire, Delhi ByCycle est un super tour operator et puis ça permet de voir la ville autrement qu’à travers le pare-brise d’un tuk-tuk et ça, ça change ! On traverse donc Old Delhi à l’heure où les camions déversent des montagnes de quartiers de chèvre et de pieds de buffle bien sanguinolents, où les gens se lavent et se brossent les dents en groupe devant les pompes à eau,  où les plus pauvres font la queue devant les temples pour avoir un petit-déjeuner et où les enfants partent à l’école, entassés à 15 dans un rickshaw qui, pour la peine, est fermé par des grilles pour ne pas perdre son chargement. On fait également un petit tour en barque sur la Yamuna River qui traverse Delhi… Alors quand je disais que j’avais pas envie de me baigner dans la Seine… je vais peut-être changer d’avis ! L’eau de la Yamuna est si noire qu’on ne voit même pas le bout des rames ! La rivière est sacrée et le plus grand crématorium de Delhi se situe au Nord de la ville. Dans le temps, les gens se faisaient incinérer avec du bois de santal (sacré, lui aussi) mais aujourd’hui, les gens n’ayant pas les moyens de s’offrir un joli bûcher en bois de santal, on ne met qu’une seule buchette en santal et le gaz fait le reste du boulot. Par ailleurs, les femmes ne sont pas admises dans le crématorium : leurs pleurs et leurs lamentations pourraient troubler les âmes au moment du grand départ… Bref, les cendres sont toutes balancées dans la Yamuna dans laquelle se déverse aussi les égouts de la ville et on comprend vite pourquoi, après Delhi, la rivière n’est plus qu’un immense ruban de détritus noirâtre… Depuis quelques années, le gouvernement dépense des fortunes pour tenter des actions de dépollution mais visiblement, y a encore du boulot !

Bref, après avoir pédalé pendant plus de 3 heures, en évitant les vaches, les chiens, les enfants, les tas d’ordures, les charrettes qui viennent à contre-sens et les fils électriques qui sont suspendus à 1m50 du sol, on finit par aller prendre le petit déj dans un très fameux restaurant de Old Delhi, le Karim’s. Le restaurant est tout petit, existe depuis presqu’une centaine d’années  et sert des naans tout frais et tout chauds. Au menu, chèvre marinée et bouillie pendant 7 heures, curry de légumes et bien sûr, un peu de dhal. Dé-li-cieux !

Après tout ce sport et cette culture, il était temps de se ramollir un peu le cerveau et j’ai donc fait la même chose qu’une bonne majorité d’Indiens à Delhi le samedi après-midi, je suis allée au mall faire du lèche-vitrine. Très drôle de voir toutes ces marques connues, ces cosmétiques de luxe et ces boutiques de chaussures quand on sait que la majorité des Indiens sont en tongs, achètent leurs vêtements dans la rue et ne mettent pas crème anti-rides. Pourtant, il y a un monde fou, les gens ont les bras chargés de sacs et le food court est plein à craquer. J’envisage une très sérieuse épidémie d’obésité en Inde dans les 20 prochaines années. Les franchises américaines pullulent (KFC, McDo, Pizza Hut, …) et les gens mangent à longueur de journée des trucs archi sucrés, frits et bien gras. Cela étant dit, ça ne concerne que ceux qui sont capables de s’offrir un repas à plus de 300 roupies et rapporté au 1,2 milliards de gens vivant dans ce pays, c’est peut-être finalement pas énorme.

Pour finir ce samedi en beauté, j’ai été invitée à une soirée très sympa sur un roof-top avec plein d’expats qui vivent et qui travaillent à Delhi. Tout le monde demande à tout le monde « Et toi ? tu fais quoi ici ? » et c’était plutôt drôle de répondre : « Moi ? Rien ! Je tourisme professionnellement… ». Tout ça en grignotant des brochettes de bœuf (sacrilège !!) et en sirotant des vodka-cranberry… Un petit morceau d’ancienne vie en quelque sorte !

Photos ici.