Ola Isla de Pascua !

Au moment de tracer l’itinéraire de ce voyage, je ne sais pas pourquoi, je n’ai pas choisi d’aller à Tahiti, aux Fidji, ou sur un de ses petits archipels paradisiaques qui parsèment l’Océanie. En fait si, je sais pourquoi. Les plages de sable blanc qui coule entre vos orteils bordées d’une rangée de cocotiers et le long desquelles déroulent des vaguelettes turquoise dans lesquelles frétillent des raies manta, c’est joli mais faut dire ce qui est, au bout de 48 heures, on s’y emm… Si. C’est vrai. OK, peut-être au bout d’une semaine seulement. Alors je me suis dit, puisque tu vas au bout du monde, va donc faire un tour à l’île de Pâques ! Ah… l’île de Pâques, l’endroit le plus isolé de la terre, dont l’île la plus proche est à 2 000kms et la ville la plus proche à près de 4 000kms… et où il y a plus de Moai que d’habitants ! Et puis soyons honnêtes, si j’y allais pas maintenant, il est clair que je n’y serais jamais allée. Alors j’ai dit « Banco ! » (non, je crois que je l’ai pas dit) et j’ai rajouté un saut à l’île de Pâques dans les billets d’avion.

Je sais pas pour vous mais pour moi, l’île de Pâques, c’était juste un micro confetti posé quelque part dans le Pacifique qu’on voit à la télé dans les documentaires du commandant Cousteau avec des statuettes aux longs nez posées dessus et personne capable d’expliquer ce qu’elles font là. La vérité… c’est tout à fait ça. Mais laissez-moi quand même vous raconter ce qu’on sait, for sure, à propos de l’île de Pâques.

D’abord ça s’appelle l’île de Pâques parce que le petit futé de néerlandais, un amiral du nom de Roggeveen, qui a découvert l’île en 1722 s’est pointé le matin du dimanche de Pâques. 1/ Il avait pas beaucoup d’imagination, et 2/si vous voulez mon avis, il n’a absolument pas tenu compte de la ligne de changement de date et y a fort à parier qu’en fait, on était déjà lundi ou encore samedi…  Il a eu un sacré coup de chance notre ami l’amiral parce que l’île, elle ne fait pas plus de 117km², c’est vraiment un confetti, tellement que quand tu es à un bout et que tu te retournes, tu vois l’autre. Bref, quand il est arrivé sur l’île, il a découvert que quelques tribus vivaient là, que ces gens avaient eu l’idée exotique d’élever des plateformes face à la mer sur lesquelles ils avaient élevé des statues qu’ils appelaient Moai, de tailles variées mais avec toutes le même sourire figé (on peut carrément dire qu’ils tirent la tronche). La population de l’île était alors estimée à 15 000 personnes et tout le monde vivait plutôt en bon voisin. Le rapport de Roggeveen indiquait qu’il n’y avait aucune installation moderne (pour l’époque, hein, on se comprend) sur l’île et qu’a priori, c’était la première fois que les insulaires avait un contact avec le reste du monde.

Ce n’est qu’en 1774, soit 52 ans plus tard, autant dire que pas grand-monde se souvenait du Néerlandais, que notre ami James Cook, qui décidément n’en rate pas une, est allé lui aussi faire un petit tour à Pâques. Il avait dû se passer des trucs entre temps parce que beaucoup de Moai gisaient face contre terre ou avaient été endommagés. Ce coup-ci, on a soupçonné des guerres tribales.

Enfin, en 1788, c’est La Pérouse (qui ne possédait pas encore d’usine à sucre en poudre) qui est venu faire son inspection et lui, il a trouvé que la population était plutôt prospère et sereine ce qui laisse supposer qu’à leur manière, ils avaient fumé le calumet de la paix.

Pas de bol pour les Rapa Nui (oui, parce qu’en fait, l’île, elle avait déjà un nom, Rapa Nui mais le Néerlandais n’avait pas pris la peine de demander), c’était la fin de la récré. Finies les petites guerres tribales tranquilles dans son coin, l’heure de la mondialisation avait sonné.

D’abord, en 1862, des négriers vinrent embarquer un bon millier d’habitants pour les réduire au travail forcé dans les mines de guano de Chincha, au Pérou. Je m’imagine bien, moi, je suis une Rapa Nui en train de danser tranquillou devant mes Moai et hop ! 3 types m’embarquent pour me forcer à mettre les mains dans du caca d’oiseau dans un trou à des milliers de kilomètres de chez moi. Je crois que j’aurais pas aimé… Bon, l’Eglise catholique trouve ça moyen-moyen. Alors elle met la pression et elle demande qu’on ramène les gens chez eux. Les négriers (qui doivent avoir 2 ou 3 trucs pas nets sur la conscience et qui ont peur de finir en enfer) capitulent et ramènent les survivants sur un petit bateau, normal, ils sont 15. En plus, ceux qui sont revenus ont propagé une épidémie de variole manquant exterminer ceux qui étaient restés. Tout contents de leur succès, des missionnaires viennent évangéliser ce qui reste de la population dans la foulée. Et puis en 1870, l’aventurier Jean-Baptiste Dutroux-Bornier (c’est quand même moins cool que Bob Morane comme nom pour un aventurier) décide de coller tout ce petit monde au commerce de la laine parce que les moutons se plaisent bien sur l’île. Mais comme un mouton, ça n’a pas tellement besoin qu’on le surveille, il envoie plein de Rapa Nui filer un coup de main dans les plantations de Tahiti (en même temps, c’est quasiment l’archipel le plus proche). Du coup, les missionnaires ne sont pas contents. Parce que eux, ils préfèrent envoyer les gens aux îles Gambier. Bref, ça se chamaille et Bob Morane finit assassiné.

En 1888, le Chili décide que Pâques, c’est chez lui (rappelez-vous, on en a parlé ici). Mais bon, c’est quand même pas la porte à côté (Santiago est à 3 700kms) et puis des Rapa Nui, il n’en reste que 111 (oui, beau boulot messieurs les mondialisateurs !) alors l’île est cédée à une compagnie anglaise spécialisée dans la laine qui fait office de gouvernement et qui parque les habitants dans le seul village, Hanga Roa, avec interdiction de mettre les pieds dans le reste de l’île. Sympa. Evidemment, les Rapa Nui n’ont pas la citoyenneté chilienne, pas le droit de vote, pas le droit de quitter l’île, bref, très sympa. Et cette situation dure jusqu’en 1964. Là, quand même, on finit par leur attribuer au moins la citoyenneté chilienne. Et puis 3 ans plus tard, quand le premier vol commercial atterrit en provenance de Santiago, c’est le début de l’ère touristique. Détail amusant, dans les années 1970, la NASA a subventionné l’agrandissement de la piste de l’aéroport Mataveri pour créer un terrain d’atterrissage d’urgence pour les navettes spatiales. La piste est aujourd’hui une des plus longues du monde. Aujourd’hui, il y a un vol par semaine qui relie Santiago à Tahiti en faisant escale sur l’île et un vol quotidien entre Santiago et l’île, transbahutant environ 65 000 touristes par an. C’est pas le Pérou mais ça permet aux habitants de rester vivre sur l’île et aujourd’hui, Hanga Roa abrite environ 5 000 Rapa Nui. L’île a également acquis le statut de territorio especial depuis 2008. Ça veut dire qu’elle bénéficie d’une plus grande autonomie que les autres départements chiliens mais l’indépendance n’est pas encore à l’ordre du jour.

Voilà. Maintenant qu’on est incollable sur l’île de Pâques, allons donc chatouiller les moustaches des Moai !

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