chili
Passe moi l’sel !!
A 5h pétantes, Josselin, Justine, Papa et moi, on est debout sur le trottoir à trépigner d’impatience en attendant que passe nous chercher le minibus qui nous emmène à la frontière bolivienne. Aujourd’hui, on part pour le Salar d’Uyuni, facilement dans le top 5 de ma liste d’endroits à aller voir pendant ce voyage.
Les rues sont plongées dans le noir, les étoiles constellent encore le ciel, on aperçoit même un bout de voie lactée. Quelques chiens errants et fêtards bien imbibés errent dans les rues et passent devant nous en se demandant bien ce qu’on fait là avec tout notre barda. A 5h30, le minibus arrive enfin. Il termine la tournée de la ville pour récupérer les petits chanceux qui traverseront leSud Lipez ces 2 prochains jours et à 6h, on quitte enfin San Pedro de Atacama.
A cause des chutes de neige des derniers jours, on ne peut plus passer la frontière comme prévu à côté de San Pedro mais il nous faut remonter jusqu’à Ollague, 300kms plus au nord. 300kms, 3 heures. Dont 2 à une vitesse folle sur une piste crevée de nids de poule où tu te dis que finalement, c’est bien que tu aies zappé le petit-déjeuner… Le paysage est déjà incroyable : des volcans, des montagnes gigantesques au sommets saupoudrés, des grandes plaines dorées et ici et là, une voie de chemin de fer qui serpente.
Vers 11h, on atteint le poste frontière chilien. Parce qu’avant d’entrer en Bolivie, faut déjà qu’on sorte du Chili. Mais apparemment, on n’est pas les seuls à avoir envie de sortir ce jour-là. On se fait donc une bonne heure de queue pour obtenir le précieux tampon de sortie avant de remonter dans le minibus et de parcourir 2 kilomètres supplémentaires. Là, au beau milieu du no man’s land, une bonne vingtaine de jeeps de différentes agences attendent sagement leurs clients. Avant d’entamer l’aventure bolivienne, on a donc le droit à un petit-déj (il est midi mais dans la vie, faut pas se laisser abattre) avec notre premier maté de coca, une infusion de feuilles de coca, bien connues pour être l’ingrédient de base de la cocaïne mais utilisée partout dans les Andes pour ses propriétés médicinales aidant à combattre le mal des montagnes. La coca, tu la bois ou tu la chiques. Nous, on commence par la boire. C’est bizarre, pas très bon, moi je trouve que ça a un vieux goût d’herbe coupée mais bon, on est là pour découvrir la culture locale, pas pour faire une critique culinaire… Et puis l’air de rien, on est déjà à 4000m et on ne plaisante pas avec ces choses-là.
On fait alors connaissance avec notre chauffeur pour les 3 prochains jours, Jaime. Jaime, il parle espagnol, quelques mots d’anglais et basta. Mais il a l’air super sympa et une fois que nos sacs sont chargés et emballés sur le toit de la jeep, on part pour le poste frontière bolivien. Bizarrement, côté bolivien, y a personne. Alors, juste le temps d’une petite photo…
… et en voiture Simone ! Dans la jeep, on est 6 : notre équipe de choc et 2 Américains, Kim et Matt. 7 avec Jaime. Rapidement, on se rend compte qu’on a bien de la chance d’être tombés sur Jaime. Il conduit bien, nous raconte plein de trucs sur ce qu’on voit et quand vient l’heure du déjeuner (non, on ne passe pas notre temps à s’empiffrer, c’est juste qu’on avait pris un peu de retard sur le breakfast time) au bord d’une lagune à flamants et qu’on retrouve les autres jeeps, on a de loin le meilleur menu. Chaque chauffeur s’occupe de ravitailler son équipage. A chaque pause, il font le tour des voitures, vérifient que tous les pneus sont encore bien gonflés et que les plaquettes de frein ne sont pas collées quelque part où elles ne devraient pas être (ce qui arrive à une autre jeep au bout de 20 minutes). On passe ainsi l’après-midi à traverser le Sud Lipez vers le sud jusqu’au coucher du soleil sur la Laguna Colorada, une lagune rouge sang à cause des microalgues qui vivent dedans. Une fois que la nuit est tombée, il nous reste encore à rallier notre refuge pour la nuit, quelque part au milieu de ce désert. Et déjà que normalement la nuit dans le désert c’est froid, mais à 3800m, la nuit dans le désert ça caille sévère. Jaime, lui, il s’en fout, il a enfilé un pyjama intégral en fourrure mais nous, à l’arrière de la jeep, on rigole moins. On arrive quand même à négocier qu’il nous mette un peu de chauffage. Pour ça, faut s’arrêter, ouvrir le capot et tripoter des trucs dessous… c’est normal. Peu importe, au bout de 10 minutes, ça va déjà mieux. Par contre, Jaime, tout engoncé dans sa combinaison en pilou-pilou, il crève de chaud. Bah la prochaine fois, il nous fournira le pilou-pilou, hein !
On arrive donc vers 20h dans le village (12 bicoques à tout casser) où on doit passer la nuit. Là, on a droit à une bonne soupe brûlante et une plâtrée de spaghettis sauce à l’ail… Comme Jaime n’a pas prévu d’animation pour la veillée, on va donc se coucher vite fait après. De toute façon, sous les tonnes de couvertures, c’est le seul endroit où il fait une température acceptable. Parce que non, y a pas de chauffage. Y a pas d’eau chaude non plus et les toilettes sont à l’extérieur, autant dire que t’as pas intérêt à avoir envie de faire pipi au milieu de la nuit, le risque de surgélation instantanée est bien trop élevé.
Le lendemain matin, après un petit-déjeuner de rois (pancakes et manjar, la version occidentale du dulce de leche argentin), on retrouve Jaime et on repart pour une journée de balade entre gros cailloux aux formes bizarres, lagunes envahies de lamas et de gros lapins à queues d’écureuils et montagnes toujours aussi somptueuses. Toutes les jeeps s’arrêtent plus ou moins aux mêmes endroits. Mais Jaime, il sait bien que nous, on n’aime pas ça. Alors à chaque fois, il prend des routes un peu différentes et nous arrête dans des coins où y a personne. La veille au soir, au refuge, on a entendu des gens qui se plaignaient de leur chauffeur qui ne leur parlait pas et qui roulait comme un dingue. Nous, on est bien contents que le hasard fasse bien les choses. En plus, Jaime, il a un iPod plein de super musique bolivienne, c’est la fête. Bref, on roule dans le désert pendant des heures et en fin de journée, on arrive au bord du fameux salar, devant un hôtel de sel. Jaime a eu beau faire tout ce qu’il pouvait, on n’est arrivé qu’en second. Un hôtel de sel, c’est un hôtel où les murs, le mobilier et le sol sont en pierre de sel. J’y croyais moyen, j’ai voulu vérifier, j’ai léché un mur. C’était bien salé. On a juste eu le temps d’aller admirer le coucher du soleil avant de se retrouver plongés dans la nuit noire et glaciale… Alors on a vite avalé le dîner que Jaime nous avait préparé avant d’aller se glisser entre nos draps en polaire sous une bonne tonne de couvertures.
Ce matin, à 4h30, quand le réveil sonne, on ramasse vite fait nos affaires et on rejoint Jaime pour charger la jeep. Dehors, tout le monde s’agite pour partir au plus vite, lampe frontale vissée sur le front parce qu’à cette heure-ci, le générateur n’est pas en route. Ce matin, il faut partir de bonne heure pour aller voir le soleil se lever au milieu du salar. Alors après une petite heure à rouler à tombeau ouvert en se demandant bien comment Jaime fait pour trouver la route vu qu’il n’y a pas l’ombre d’un panneau ou d’une piste à l’horizon, on finit par s’arrêter, comme ça, d’un coup, au beau milieu d’un grand terrain plat dont on sait qu’il va être immense et blanc mais dont on ne devine que les quelques mètres qui nous entourent pour l’instant. Il fait froid, très froid. Mais doucement, les premières lueurs éclairent l’horizon et peu à peu, le salar apparaît… Et là, c’est… blanc, ok, immense, ok, mais c’est surtout… fantastiquement indescriptible. Voilà, le salar d’Uyuni, c’est ça.
C’est complètement dingue. Quand on gratte un peu le sel, qu’on casse la croûte, un peu comme celle d’une crème brûlée, on trouve de l’eau. Et plein de gros cristaux de sel. Et puis en dessous, on trouve encore du sel et puis un peu de terre et encore du sel et de la terre et ainsi de suite sur parfois jusqu’à 40 mètres d’épaisseur. Alors on reste là, à photographier tout ça sous toutes les coutures, en râlant parce que les photos ne rendent pas compte de la réalité et parce que c’est encore bien plus beau en vrai. Alors on finit par juste regarder et regarder encore à s’en brûler les yeux…
Au bout d’un moment, Jaime, qui lui, vient regarder le spectacle 3 fois par semaine et qui commence à être un peu blasé, nous force à remonter en voiture et nous emmène jusqu’à l’autre bord du salar où des paysans boliviens exploitent le sel. Le boulot est crevant, les conditions hyper difficiles et ça ne rapporte pas grand-chose alors ils ne bossent que le strict minimum et le reste du temps, l’usine de conditionnement ne fonctionne pas. Nous, on trouve ça joli tous ces petits tas de sel mais c’est vrai que ça doit pas être rigolo.
Notre dernier arrêt avant Uyuni est le fameux cimetière de trains à côté de la ville. Il y a des années, un train reliait Uyuni à Antofagasta (sur la côte chilienne). Depuis près de 40 ans, on a abandonné le train (probablement bien trop cher à entretenir entre le sel, le sable, les Andes et les températures glaciales). Depuis, des tas de vieux trains rouillent et s’enfoncent gentiment dans le sable au milieu de ce qui ressemble plutôt à un grand terrain vague. On comprend pas bien pourquoi c’est si fameux et apparemment, Jaime non plus. Et puis il nous dépose finalement à Uyuni. Là, notre premier objectif, c’est de trouver des billets dans un bus pas trop pourri qui part le soir même pour La Paz. Kim et Matt, les 2 Américains qui partagent notre jeep depuis 3 jours sont dans le même cas que nous. On arrive à trouver notre bonheur et on se retrouve tous les 4 sur le trottoir à devoir s’occuper pendant les quelques heures qui nous restent avant le départ du bus. Alors on traîne, du Mac internet café à l’Extreme Fun Pub, on finit par dire au-revoir à Josselin et Justine qui repartent côté chilien le lendemain et à l’heure dite, on grimpe dans le bus où on s’empresse de récupérer des couvertures (y en a pas pour tout le monde). Et au moment où le bus démarre, on se dit qu’on a bien fait de pas prévoir de rester plus longtemps à Uyuni, c’est vraiment trop déprimant comme ville.
Photos ici.
San Pedro de Atacama
Après une nouvelle nuit bien calés au fond d’un bus, on assiste au lever du soleil sur l’immensité vide du désert d’Atacama. Dès que les premiers rayons du soleil passent le sommet des dunes, on découvre un paysage immense, plat, avec quelques collines dans le fond et… désert. Seules quelques pistes partent de la route pour se rendre dans les mines et des mineurs descendent parfois du bus au milieu de ce nulle part. C’est beau.
Vers 9h, on arrive à San Pedro de Atacama, l’oasis au milieu du désert. Les collines se sont déjà transformées en belles montagnes et la route qui descend dans la vallée nous laisse apercevoir que la ville n’a pas usurpé sa réputation : entre les montagnes arides et le salar d’Atacama, une gouttelette de verdure et un village… San Pedro. Bienvenue dans le désert le plus aride du monde (le Sahara à côté, c’est du pipi de chat).
San Pedro est LA ville la plus touristique du Chili. A près de 2400m d’altitude, elle sert de camp de base aux aventuriers de tous poils venus se mesurer aux volcans qui l’entourent (le Licancabur, 5960m), à ses lagunes (Laguna Chaxa, Laguna Miquines, Laguna Miscanti, y en a pour tous les goûts), à ses geysers (El Tatio, 4300m, le plus haut champ de geysers du monde), à ses vallées époustouflantes (Vallee de la Luna, Vallee de la Muerte) et bien sûr à l’inévitable expédition dans le Salar bolivien d’Uyuni.
La première chose qu’on a faite en arrivant à San Pedro, c’est d’oublier la moitié de nos affaires dans le bus et de ne nous en rendre compte que 30 minutes plus tard ce qui m’a valu un petit sprint de bon matin à travers les ruelles en terre battue. Piquer un sprint de bon matin, j’aime pas ça. Mais piquer un sprint de bon matin à 2400m d’altitude… j’aime pas du tout beaucoup ça ! Bon, la bonne nouvelle c’est que j’ai quand même pu récupérer nos affaires sous le regard goguenard du steward du bus qui me regardait haleter comme si je venais de faire un marathon. La mauvaise, c’est que justement, j’avais pas couru de marathon et je venais de me faire rattraper par l’altitude… Bon, heureusement, on avait prévu de rester là 3 jours pour s’acclimater doucement avant de passer la frontière bolivienne et à l’étape suivante. En attendant, on découvre le village. C’est tout petit (en même temps, y a que 5 000 habitants), les rues sont en terre, les maisons sont blanches et en adobe (un mélange de terre et de paille séché au soleil), la Plaza de Armas est kromeugnonne et l’église d’un blanc éclatant contraste parfaitement avec le ciel d’un bleu azur. Et ça tombe bien parce que le bleu azur, ça va pas durer.
On passe donc la matinée à arpenter la rue principale pour faire le tour de quelques agences et récupérer des infos sur les tarifs des excursions dans les environs et on décide d’aller démêler tout ça devant une bonne assiette d’empañadas. En entrant dans le resto, on tombe sur… Josselin et Justine ! Ils ont finalement décidé de venir directement à San Pedro et se demandent aussi comment organiser leur séjour ici. Par hasard, ils sont tombés sur un type qui leur a proposé de leur louer un van et la proposition les tente. On se dit que puisque nous, on est déjà installés dans un hôtel, eux peuvent dormir dans le van et on se baladera ensemble pendant les 2 prochains jours en visitant les différents sites par nos propres moyens, on partagera les frais et tout le monde sera gagnant. Après le déjeuner, on va aussi réserver tous ensemble notre expédition pour le Salar d’Uyuni 3 jours plus tard. Après avoir tenté de négocier un petit rabais sur la facture totale (tenté…), on se retrouve dehors, assez contents d’avoir été efficaces et du coup, on se donne rendez-vous le lendemain à 5h pour aller assister au réveil des flamants roses et au lever du soleil sur la Laguna Chaxa à 60kms de là.
On passe donc le reste de l’après-midi à régler des contingences plus matérielles comme faire la lessive, faire quelques courses, se balader un peu et profiter du soleil. En fin d’après-midi, le ciel se couvre et le soleil couchant nous offre alors un spectacle plutôt surréaliste…
Mais une fois le spectacle finit, on réalise assez vite qu’effectivement, on est peut-être en plein désert mais très loin du niveau de la mer ! Nos prochains achats sont donc un pull et une paire de chaussettes en alpaga (en fin.. d’après la vendeuse, c’est de l’alpaga, d’après moi, c’est plutôt du poil de chat mais peu importe, ça tient chaud), et un bonnet et des gants histoire de ne pas se retrouver congelés…
Le lendemain matin, on retrouve donc nos deux aventuriers de l’extrême qui ont passé la nuit dans leur van et on prend la route de la Laguna Chaxa dans le noir absolu. Après une bonne heure de route, on arrive devant l’entrée du site… fermée par une barrière. On se dit qu’on ne devrait pas attendre bien longtemps avant l’ouverture puisqu’on ne précède les tours operators que d’une demi-heure. On en profite pour prendre un petit déjeuner au chaud et à 7h, alors que le soleil a déjà pointé le bout de son nez depuis 20 bonnes minutes, on aperçoit une camionnette qui emprunte la piste de la lagune. Hourrah ! c’est l’homme qui a la clé ! On est donc les premiers à arriver devant les flamants qui ne sont pas encore bien réveillés et qui ont la tête plongée dans l’eau pour trouver leur petit-déjeuner. On arrive à les approcher d’assez près et c’est assez impressionnant parce que ce sont de grosses bêtes quand même ! On a même le temps de s’offrir une séance photo carte postale et une petite balade autour du lac avant que n’apparaissent les premiers touristes. Vraiment, aucun regret de s’être levés de si bonne heure, ça valait vraiment le coup !
Du coup, on poursuit notre exploration du désert d’Atacama et on traverse des paysages tous plus grandioses et fantastiques les uns que les autres jusqu’à arriver aux Laguna Miquines et Miscanti où là, le ciel vire franchement au gris et où quelques flocons vont finir par nous tomber dessus… Des flocons ! De neige ! En plein désert ! Le plus aride du monde, je rappelle ! Heureusement, ça ne dure pas bien longtemps et le temps de changer de vallée, la météo est redevenue supportable. On passe ainsi toute la journée, de lagunes en salar, de villages perdus désertés en vallée oasis couverte d’arbres fruitiers, certains s’offrent même un petit bain dans la Laguna Cejar (où la concentration en sel est équivalente à celle de la mer Morte) et on rentre à San Pedro au coucher du soleil, la tête pleine d’images fabuleuses et le corps encore tout secoué des kilomètres avalés sur les pistes défoncées.
Comme on compte remettre ça le jour suivant, on va dîner de bonne heure et on rentre se coucher avec les poules. Le réveil est réglé à 3h30…
Parce que le lendemain matin, c’est à 4h qu’on remonte en voiture, direction les geysers d’El Tatio. Là encore, il paraît que c’est au lever du soleil que c’est le plus impressionnant alors nous, bêtes et disciplinés, on s’enfile 2 heures de route de montagne, toujours dans le noir le plus total et espérant qu’au bout de la piste, le spectacle soit à la hauteur… En route, après avoir manqué écraser un drôle de lapin à queue de renard et un paquet de petites souris blanches, de jolis flocons viennent subitement danser devant nos phares… Le temps d’arriver jusqu’au geysers, il neige franchement et pour le lever de soleil, on repassera…
Du coup, on a beau se retrouver au beau milieu du champ de geysers le plus haut du monde (4300m quand même), on se gèle et on a un peu de mal à apprécier l’endroit. D’autant plus que les fameux geysers ne sont en fait que de tout petits bouillons voire à peine quelques fumerolles (à se demander quand ont été prises les photos étalées sur les murs de toutes les agences de la ville) et que vu le foin que tout le monde fait autour de ce truc, on s’attendait à carrément mieux. Alors au bout d’une demi-heure, on remballe et on décide de rentrer à San Pedro. La piste est déjà couverte de 2 bons centimètres de neige qui tiennent bien et on ne peut pas vraiment dire qu’il y ait foule de voitures ou de minibus qui soient passés avant nous. On prend donc notre temps et malgré le froid et le ciel de plus en plus gris, on apprécie le paysage. Dans un virage, on tombe même sur un troupeau de lamas qui traversent tranquillement la route… magique !
En arrivant à San Pedro, il est encore tôt et on décide d’aller explorer la vallée de la Luna tout près. Là encore, les paysages extraordinaires s’enchaînent, nous surprenant à chaque fois. C’est dingue comme les paysages peuvent être différents à quelques kilomètres d’écart ! On se faufile dans un grotte sombre et étroite avant de grimper au sommet d’une dune géante et d’admirer de là tout le désert… Et puis, puisque ça faisait maintenant 2 jours qu’elle menaçait, la pluie finit par crever le ciel et nous force à rentrer. Et là, dans le désert le plus aride du monde, là où de mémoire d’homme, il n’a jamais plu au mois de mai, s’abattent des trombes d’eau pendant tout le reste de l’après-midi… Personne n’y comprend rien. Les maisons ne sont pas construites pour résister à toute cette eau et quand on rejoint notre chambre, elle s’est transformée en piscine… Le mur de la salle de bain dégouline littéralement et il commence à être temps de mettre à l’abri ce qui traîne encore sur le plancher. La pauvre fille de la réception est complètement débordée, l’hôtel prend l’eau et elle n’a que des casseroles à prêter pour limiter les dégâts. Entre temps, on a appris que notre départ pour le Salar d’Uyuni prévu le lendemain est repoussé au jour suivant parce qu’avec toute la neige qui tombe à la frontière, la route est coupée. On est donc coincés un jour de plus à San Pedro. Bien. Ca ne nous arrange pas mais puisqu’on n’a pas le choix, on survit. Jusqu’à ce qu’on se rende compte qu’il pleut sur le lit ce qui est, littéralement, la goutte d’eau qui fait déborder le vase alors on ramasse nos affaires, on se fait rembourser la nuit dans l’hôtel aux plafonds qui fuient et on part s’installer ailleurs. D’ailleurs, ailleurs, c’est bien mieux. Certes, y a plus d’électricité comme dans la majeure partie de la ville mais il ne pleut pas dedans et la dame de l’hôtel nous accueille à bras ouverts. Mais la ville s’est transformée en un immense champ de boue, les rues se remplissent à vue d’œil et au resto, les sceaux s’alignent autour de la pièce signalant chaque fuite. C’est complètement dingue. Normalement, il pleut 2 fois par an à San Pedro au mois de février. Deux bonnes grosses averses et c’est fini. Là aussi, les maisons prennent l’eau mais ça dure si peu longtemps et ça sèche si vite que personne ne se soucie d’étanchéifier les toitures. Là, c’est le déluge et personne ne sait quoi faire. Rhalala, le réchauffement climatique ma bonne dame, y a plus de saison toussa toussa…
Le lendemain matin, le ciel est redevenu bleu et le soleil entreprend son travail de séchage. Puisqu’on est coincés là, on refait un petit tour de la ville en passant par le marché artisanal où 4 boutiques se battent en duel mais où on assiste à un cours de poterie sur un vieux tour de potier en bois. Un peu plus tard, on retrouve Josselin et Justine qui ont rendu le van et se sont installés dans le même hôtel que nous et on décide d’aller jusqu’à la vallée de la Muerta à pieds. 4 kilomètres, ça ne devrait pas poser de problème. En plus, c’est facile. On nous a dit que c’était la première à droite sur la route de Calama. Alors on y va. Et au premier petit sentier sur la droite, on bifurque. C’est forcément là, on aperçoit des gens au sommet de la colline derrière. On grimpe le long d’une crête et… ah bah non, le chemin s’arrête net, ça doit pas être par là. Bien. Sauf qu’on n’a vraiment pas envie de faire demi-tour et que de là où on est, on voit très bien où passe le chemin. Alors on prend à travers champs (sauf qu’il n’y a pas de champ mais c’est pareil). Et on retrouve devant un grand barbelé et une pancarte qui dit « No Entrar ». Mon espagnolo n’est pas au plus haut niveau mais je comprends bien que ça dit quelque chose comme « Pas par là ». Mais nous, on s’en fout. On passe derrière le barbelé et on grimpe. Arrivés au sommet, on retrouve une famille de Français hyper sympas qui sont en tour du monde et qui dorment, eux aussi, dans le même hôtel que nous (les Rambautourdumonde). Et qui nous apprennent qu’on a bien fait de grimper par le sentier interdit parce que de l’autre côté, y a une entrée… payante. On aurait voulu faire exprès qu’on aurait pas aussi bien réussi. On se dit que puisqu’on est là, on va redescendre par la voie officielle histoire de jeter un œil aux ruines incas un peu plus bas. Mouais… des tas de petits murets en pierre cassés, rien de bien excitant. En ressortant, on tente notre chance en stop. Un beau pick-up rouge s’arrête, une petite dame nous fait signe de grimper, on s’entasse comme on peut sur la banquette arrière et chauffe Marcel ! 5 minutes après, elle nous dépose à San Pedro et on se dit que finalement, cette dernière journée n’est pas si perdue que ça.
Pour fêter notre dernière soirée en terre chilienne, on organise un grand dîner sur la terrasse de l’hôtel avec tous les francophones de l’hôtel. Quelques poulets rôtis et portions de frites plus tard, on part se coucher, l’estomac plein et la tête pleine de chouettes souvenirs de notre étape à San Pedro. Demain, le réveil sonne à 4h30, on a rendez-vous avec la Bolivie.
Photos ici.
NDLR : Si vous passez à San Pedro de Atacama, n’allez surtout pas chez Hostelling International. Il y fait froid, ça n’est pas si bon marché, vous n’aurez pas droit au petit-déj soi-disant inclus puisqu’il n’est servi qu’à partir de 8h et que vous quitterez l’hôtel bien avant pour visiter les environs, l’eau chaude est intermittente comme le wifi et si jamais il pleut, vous n’aurez droit qu’à une poêle à frire en travers de votre lit. Donc non, n’allez pas là. Par contre, allez à la Residencial Villacoyo, hyper sympa, pas froid, avec l’eau chaude en continu, pas de petit-déj et pas de wifi mais encore moins cher et surtout… étanche.
Parque Nacional Pan de Azucar
A 5h du matin, le bus s’arrête, mes petits yeux collés s’ouvrent (pas trop grands) et le steward du bus (on va l’appeler comme ça puisqu’il travaille dans le bus mais que c’est pas le conducteur) annonce « Chañaral ! Chañaral ! ». Et m***, il est pas en retard, faut descendre…
Le plan, c’est d’acheter les billets de bus pour le trajet suivant et de squatter la gare routière jusqu’à ce que les hôtels ouvrent. Sauf qu’en descendant du bus, on s’aperçoit qu’on n’est absolument pas devant une gare routière mais devant une station-service et qu’il n’y a nulle part où squatter… Bon. La station-service étant en fait au bout de la rue principale de la ville, on se dit qu’on va essayer de repérer 2 ou 3 adresses et se poser sur un banc en attendant. En attendant quoi, on sait pas mais de toute façon à cette heure-là, y a rien d’autre à faire. Je sors mon bonnet et mes gants. Il fait pas chaud dans ce pays à cette heure-ci. A partir de 6h, on commence à voir quelques mineurs qui partent travailler dans des pick-ups avec de grands panneaux « EXPLOSIVES ». Parce que Chañaral est une ville minière à l’intérêt assez limité. Bah, qu’est-ce qu’on est venus faire là alors ? Et bah, d’après des sources plus ou moins fiables, Chañaral est la porte d’accès au Parque Nacional Pan de Azucar où on peut voir des pingouins de Humbolt, des renards gris, des guanacos (un genre de cousin du lama), des zorros (un renard gris kromeugnon) et tout un tas d’oiseaux.
Vers 7h, le soleil s’est levé et comme on commence à avoir mal aux fesses sur notre banc, on décide d’aller au terminal des bus acheter nos tickets pour la suite du voyage. Le terminal ouvre à 7h, on est les premiers clients de la journée. Il ne reste que 6 places dans le bus pour San Pedro de Atacama. On se dit qu’on a bien fait de ne pas attendre la fin de la journée pour s’occuper de ça ! En ressortant de là, on tombe sur un hôtel dont la porte est ouverte. On passe la tête et miracle ! y a quelqu’un. Le type nous fait visiter une chambre, on n’hésite pas longtemps, on n’a qu’une envie, c’est prendre une douche et finir notre nuit. On s’installe donc à la Residencial MiChica au milieu de la rue principale.
En fin de matinée, on décide de s’atteler à ce pourquoi on est là, la visite du parc. Je demande donc à la dame de l’hostal où est le bus pour se rendre au parc qui est tout de même à près de 30kms. Et là, je ne comprends pas grand-chose à ce qu’elle me répond mais je comprends l’essentiel : y a pas du bus pour aller là-bas. Quoi ??? Mais comment on y va alors ? Et bah… en taxi, mais ça risque de nous coûter pas loin de 30 000 pesos aller-retour. Je m’étrangle. Bon. Il nous faut un 2ème avis. On se rend donc à la mairie. Là, à peine on a passé la porte qu’un monsieur se précipite sur nous pour nous demander ce qu’on veut. Comme je lui demande s’il parle anglais, il part me chercher quelqu’un qui est supposé me comprendre. En attendant, il nous pousse dans un bureau de 9m3 où sont empilés 3 fonctionnaires dont un qui écoute de la musique à fond, 2 gros bureaux pleins de fouillis, 1 bureau d’écolier, 2 personnes qui sont venues demander des renseignements et nous qui ne savons pas trop où nous mettre pour ne pas gêner. Au bout de 15 minutes, on finit par demander à une des employés comment on peut se rendre à Pan de Azucar. Elle confirme : y a pas de bus, faut prendre un taxi. Bon. Bah vu qu’on est là pour 48 heures et qu’on est venus exprès pour ça, on va trouver un taxi, hein ? En ressortant, juste devant le trottoir, on tombe justement sur un taxi avec un petit panneau « Pan de Azucar » sur son tableau de bord. Un signe du destin. On tourne un peu autour de la voiture et on aperçoit un monsieur qui sort de la boulangerie d’en face et qui nous fait signe. C’est l’heureux propriétaire du taxi qui va devenir notre nouvel ami. On négocie donc les 2 allers-retours (bah oui, aujourd’hui et demain, ça fait 2) à 40 000 pesos et en voiture Simone ! 200 mètres plus loin, lorsque notre chauffeur apprend que demain, c’est notre anniversaire (ah oui, parce que demain, c’est notre anniversaire), il décide qu’avant de nous emmener au parc, on va passer par chez lui manger un morceau de gâteau. Bon bah… OK. Alors malgré le fait qu’il soit 11h et que franchement, la génoise à la crème c’est pas vraiment mon truc, on est polis et on mange. La conversation est un peu laborieuse entre notre espagnol et son anglais mais on s’en sort. Et puis Guisson décide que ce soir, on va fêter ça et il nous invite à venir manger des grillades sur sa terrasse. Nous, on dit pourquoi pas.
En attendant, il nous emmène au parc où on doit passer par la case CONAF pour s’enregistrer auprès des gardiens. Là, on constate qu’on est les premiers à entrer pour cette journée et qu’il n’y a pas eu plus de 5 touristes par jour toute la semaine précédente… Ceci expliquerait peut-être pourquoi il n’y a pas de bus pour se traîner jusqu’ici. Bref, maintenant qu’on est là, on part pour le Mirador. Les yeux vifs, les oreilles aux aguets, si la moindre bestiole bouge dans les 5kms à la ronde, on va la repérer. Mais les kilomètres s’écoulent et à part quelques nuages qui flottent au loin, on ne voit rien. Bon, certes les paysages sont impressionnants, la vue sur l’océan éblouissante, les cactus tout cramés et le soleil tape mais après 5 heures de balade, notre tableau de chasse ne comporte qu’un tout petit lézard gris qui a filé entre nos pieds… On finit donc sur la plage où Guisson vient nous rechercher comme prévu. Sur le chemin du retour, on croise 2 Français qui partent à pieds vers le parc. Eux, ils veulent camper dans les cailloux, alors on les laisse faire mais on leur donne rendez-vous le lendemain pour louer un bateau et aller voir les pingouins.
Il nous ramène à l’hostal à Chañaral et réitère son invitation pour la soirée. Comme on ne peut pas vraiment dire qu’on a autre chose de prévu, on accepte. Mais en fait, ça n’est pas vraiment une invitation. Il faut qu’on partage les frais pour les courses et Guisson nous extorque 15 000 pesos supplémentaires… malin l’ami Guisson ! En plus, il nous donne rendez-vous à 21h, heure à laquelle on avait plutôt prévu d’aller nous coucher vu qu’on est debout depuis 5h… Mais peu importe ! La perspective d’une soirée en compagnie de notre ami et de sa femme est bien trop tentante, alors après une petite sieste, on le retrouve devant l’hostal et on retourne chez lui où les braises sont déjà prêtes pour l’asado. Il nous livre alors son secret pour des grillades parfaites : une pincée de sucre sur les braises et une petite feuille de journal sur la viande en fin de cuisson… Et c’est vrai que c’est très réussi ! Après un micmac d’assiettes où on ne comprend pas grand-chose, on finit par se mettre à table. Là, il nous propose de couper notre vin rouge au Coca (une pratique courante dans les pays hispanophones) mais on n’est pas tellement fan. Madame est un peu réservée mais finit par se détendre et (avec l’aide de 2 ou 3 verres de pisco) on apprend plein de choses sur les Chiliens, la période Pinochet et le Chili d’aujourd’hui. Mais l’air de rien, il commence à se faire tard et Guisson nous ramène nous coucher (après un dernier verre).
Le lendemain matin, en rangeant mon sac, je m’aperçois que mon appareil photo de secours (celui que je suis censée utiliser si je me fais faucher celui que j’utilise tout le temps) n’est plus à sa place… Comme je ne l’ai pas touché depuis le début du voyage, il ne devrait pas avoir changé de place tout seul mais sait-on jamais, je vide l’intégralité de mon sac pour vérifier. Et là, une fois que toutes mes affaires sont étalées sur mon lit, je réalise qu’il manque ma veste. Mon manteau. Mon seul et unique manteau. Le seul truc qui puisse me protéger du vent et de la pluie. Panique. Consternation. Enervement.
Je refais mentalement l’inventaire de mon sac et je vérifie que rien d’autre ne manque. Il semblerait que non. A tout hasard, j’ouvre ma pharmacie. Elle est sens dessus dessous. Clairement, quelqu’un a ouvert mon sac, sorti toutes mes affaires, fouillé ma pharmacie, pris ma veste et mon appareil photo et remis le reste suffisamment bien pour que je ne m’aperçoive de rien Damned ! Mais où ? Qui ? Comment ? Ça ne peut être qu’ici, la veille pendant qu’on était en train de chasser le renard gris. Pourtant la chambre était fermée à clé. Incompréhension. Est-ce que c’est quelqu’un de l’hôtel ? Mon père avait fermé son sac avec un cadenas, rien ne lui manque à part un chargeur d’appareil photo. On nous l’avait dit : bienvenue en Amérique du sud et… joyeux anniversaires !!!
Bon. On avait prévu de laisser nos sacs à l’hostal pour la journée en attendant le bus de nuit, on va changer d’avis. En quittant l’hostal, je signale tout de même à la dame à qui on rend les clés que mes affaires ont disparu. Elle semble surprise et m’assure qu’il n’existe qu’une seule clé de chaque chambre. Mouais. On va quand même laisser nos sacs à la consigne du terminal des bus, hein ? On retrouve notre ami Guisson qui nous explique qu’il s’est couché très tard et qu’il est très fatigué et que tout ça, c’est de notre faute.
En tout cas, nous, aujourd’hui, on a prévu de faire le tour de la Isla Pan de Azucar en bateau pour voir les fameux pingouins de Humbolt (si, ils sont fameux). Sur la route, on croise 2 petits touristes qui font du stop. Guisson s’arrête et devinez quoi ? ils sont français ! On les convainc de monter avec nous en voiture, et comme eux aussi, ils veulent voir les pingouins, on se frotte les mains en se disant qu’à 6, la négociation sera plus facile. En arrivant à Caleta Pan de Azucar (c’est LE village du parc, 3 cabanes et 4 chiens), on trouve 2 pêcheurs qui sont prêts à nous emmener faire un tour mais pas à moins de 60 000 pesos. Comme les campeurs fous manquent à l’appel, on trouve quand même que ça fait cher le pingouin… On hésite, on hésite, on tente de faire baisser le prix, on arrive à 50 000 pesos mais honnêtement, ça ne fait pas une grande différence. C’est là qu’arrivent Arturo et Martin (les campeurs). Sauf qu’ils n’ont pas un rond et qu’à 6, le pêcheur ne veut clairement pas descendre en dessous de 60 000. On argumente, on la joue sympas, en colère, désespérés, compréhensifs… rien n’y fait, c’est 60 000 ou rien. On finit donc par accepter le deal. Statistiquement, quand il y a un plan pourri du genre visiter un parc hors saison avec 6 touristes sur toute la journée et galérer à mort pour trouver un bateau qui t’emmène voir des pingouins sous un ciel tout gris, tu peux être sûr que les touristes sont français. C’est statistique.
D’après le pêcheur, il faut y aller à 16h, c’est l’heure où les pingouins sortent de l’eau et regagnent leurs nids. Du coup, on part faire un petit tour à la plage et à force de se raconter des histoires de voyage, on arrive à tuer l’après-midi. Quand on se repointe devant la cabane du pêcheur (avec des cailloux au fond du jardin), il grimace… Non, là, c’est trop tard, la marée est trop haute, on ne peut plus y aller. Alors on veut bien se faire couillonner un peu mais là, faut pas abuser des bonnes choses. On arrive donc à convaincre cette feignasse de pêcheur de nous emmener quand même et à 16h pétantes, on est dans sa barque. La marée… non mais sans blague, il a pas trouvé mieux comme excuse ?
Maintenant qu’on peut enfin les approcher, on profite du spectacle de ces petits pingouins très énervés qui font des grands mouvements de moulinets avec leurs bras pour grimper tout en haut de l’île. Ceux qui arrivent jusqu’en haut sont considérés comme les plus forts et les femelles se battent pour venir dans leurs nids… On voit aussi des loutres, des pélicans, des tas d’oiseaux et un lion de mer qui bouffe un pingouin. Bah oui, normalement, les lions de mer, ça bouffe des poissons mais là, y a pas beaucoup de poissons alors ils se mettent au pingouin. Beurk.
Et puis, comme la veille, Guisson vient nous chercher et nous ramène en ville en fin d’après-midi. Il est temps de dire au revoir à Arturo et Martin qui continuent le stop vers le nord et on va dîner avec Justine et Josselin qui, eux aussi, prennent un bus le soir même, direction Calama. Comme ils pensent aller ensuite à San Pedro de Atacama qui est notre prochaine destination, on se dit qu’on se recroisera sûrement. Et à minuit, après avoir attendu loooooongtemps notre bus entre 2 courants d’air, on grimpe enfin dedans, direction San Pedro et le désert d’Atacama, notre dernière étape chilienne.
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Un dimanche à La Sereña
Erreur de débutant. En prenant le bus à 10h du matin ce samedi, on pensait arriver à La Sereña vers 16h, enchaîner aussitôt avec un autre petit bus pour Vicuña, 60 kms plus loin dans la vallée de l’Elqui et arriver juste à temps pour se dégoter un hôtel et booker une visite dans un observatoire le soir même pour aller admirer la voie lactée.
Vicuña (et la vallée de l’Elqui) est réputée pour sa cuisine solaire (on cuit son steak en amplifiant les rayons du soleil comme à travers une grosse loupe), son pisco (c’est là qu’est distillé le précieux liquide), ses observatoires (avec plus de 300 nuits de ciel pur par an, c’est un des meilleurs endroits au monde pour scruter les étoiles) et sa douceur de vivre. Tout ça nous tentait donc bien. Par contre, fallait que tout se goupille bien parce que la suite du programme était chargée et on ne pouvait pas vraiment se permettre de prendre du retard dès le 2ème jour.
Sauf que voilà. Tout ne se déroule pas toujours exactement comme prévu. Et notre bus, tout aussi fantastique qu’il soit, est arrivé à La Sereña à 18h30, foutant en l’air toute notre petite organisation. Bon. Là, la question qui se pose est : nous ont-il dit que le trajet en bus durait 6 à 7 heures ou que le bus arrivait entre 6 et 7h ? Oui, parce qu’il semblerait que notre espagnolo ne soit pas tout à fait au niveau. Du coup, il se pourrait qu’il y ait eu mauvaise interprétation… Bref, on décide donc de zapper les étoiles (on en verra plus tard) et de passer la nuit à La Sereña, petite bourgade de 160 000 habitants. On atterrit donc à l’Hostal El Punto (très bien, si vous passez dans le coin, n’hésitez pas) et comme on a quasiment rien avalé de la journée, on ressort aussitôt à la recherche d’un endroit où remplir nos estomacs qui crient famine. Et là… on atterrit au paradis. Le paradis s’appelle en fait la Casona del 900. Alors OK, c’est un fait maintenant établi, les Chiliens ne savent pas faire la cuisine. Mais par contre, pour faire griller des kilos de viande, là, rien à dire, respect. On se retrouve attablés devant un bon gros poêlon avec un bon gros steak de bœuf, une côte de porc, une cuisse de poulet, un joli boudin et un chorizo… par personne ! Une parillada, ça s’appelle. Le tout arrosé d’une petite bouteille de vin rouge pour la modique somme de 18 600 pesos (soit 30 euros) autant dire qu’on était heu-reux ! Du coup, c’est la peau du ventre bien tendue qu’on est rentrés se glisser bien au chaud sous une pile de couvertures…
Le lendemain, c’est dimanche. Après un bon petit déjeuner (oui, la parillada est déjà loin), on part visiter la ville. Après le fouillis de Valparaiso, ça nous semble propret et bien rangé. Certaines rues sont dignes d’un décor de Zorro. Mais La Sereña a beau posséder 29 églises, on ne peut pas dire qu’il y ait foule sur la Plaza de Armas ce matin… On se dit alors que puisque les gens ne sont pas à la messe, c’est qu’ils sont au marché. Alors on y va aussi. Effectivement, c’est un peu plus vivant. Tous les marchands vendent à peu près la même chose. Des carottes nucléaires (quoi ? une carotte de 8cms de diamètre, vous trouvez ça normal, vous ?), des patates, des choux-fleurs, des tomates, des kiwis atomiques (oui, un kiwi qui est tout déformé et gros comme un pamplemousse, c’est un kiwi atomique), des bananes, des avocats (de toutes les tailles, avec la peau rugueuse, avec la peau lisse, noirs, verts, un peu violets, bref, si tu trouves pas ton bonheur, c’est que tu fais exprès), des oranges, des mini citrons verts (que quand tu les presses, ça fait plein de jus et c’est trop bon) et des fraises. Nous, on se contente d’un kilo de fraises qu’on mange en déambulant entre les étals. Et puis, on se dit que puisqu’on a une journée à tuer (oui, on a définitivement abandonné l’idée d’aller dans la vallée de l’Elqui, on préfère se garder un peu de marge pour plus tard), on va aller voir la mer. Parce que La Sereña, c’est au bord de la mer. De l’océan plutôt. Alors on prend la direction de la plage, assez facile à repérer grâce au phare planté au bout de l’avenue principale. Mais il ne fait pas assez chaud pour se baigner et les vagues sont plutôt impressionnantes. Alors, on chasse les mouettes, on regarde les vagues et puis, l’air marin, ça creuse, alors on va manger des empañadas un peu plus loin. On finit par rentrer en ville, faire un petit tour dans un jardin soi-disant japonais (si un Japonais est déjà passé par là, il a dû se faire harakiri à peine ressorti) et dans le zoo. Un zoo avec des poules, des chèvres, des moutons, 3 énooooormes vautours qui font très peur, une autruche, un émeu et 2 lamas. Comme on n’est jamais trop prudent, on ne s’approche pas trop. Ces bêtes-là, ça crache.
Et puis, tranquillement, on est retournés à l’hostal où on a squatté les canapés de la salle à manger en attendant l’heure de prendre le bus. Parce qu’on a décidé de monter un peu plus au nord mais cette fois, en bus de nuit pour en pas perdre trop de temps. Prochaine étape, Chañaral.
Photos ici.
N’en ferait-on pas un peu trop sur Valpo ?
Après avoir remis les pieds sur le continent bien plus tard que prévu, je n’ai pas eu d’autre choix que de passer la nuit à Santiago. Une drôle de sensation en rentrant dans l’immeuble de l’hostal, le portier qui me reconnaît, le type qui appuie sur les boutons à ta place dans l’ascenseur aussi (oui, c’était très classe comme immeuble), c’était un peu comme rentrer à la maison après les vacances…
La nuit fut courte. Le lendemain matin, je me suis levée aux aurores pour prendre mon premier bus chilien, direction Valparaiso où je dois retrouver mon père venu me rejoindre pour quelques semaines. Prendre un bus chilien après avoir traîné tant de temps dans les bus asiatiques, c’est comme être surclassé en business chez Emirates quand tu as l’habitude de voyager en éco chez Air France… D’abord, à la gare routière, t’as le choix entre une bonne dizaine de compagnies. Et depuis Santiago, il doit bien y avoir un bus toutes les 10 minutes pour Valpo (c’est comme ça qu’on dit quand on fait genre on est un grand voyageur). Et en plus, tu peux même choisir ta place dans le bus. Et en plus, ils mettent une étiquette sur ton sac quand ils le mettent dans la soute pour ne pas le rendre à quelqu’un d’autre « par mégarde ». Et en plus, y a monstre de place pour les jambes. Et en plus, le bus part à l’heure. Et en plus, y a un compteur qui te dit à combien le bus roule et si le chauffeur dépasse les 100km/h, ça sonne. Parce que les bus n’ont pas le droit de rouler à plus de 100km/h. Et en plus, les routes ne sont pas toutes défoncées et t’as l’impression de glisser sur un tapis volant. Bref, c’est le top du top…
Une petite heure et demie plus tard, j’arrive donc à Valpo où mon papa est venu me chercher à la gare routière et m’emmène à l’hostal, la Casa Verde Limon, une jolie maison toute verte (évidemment) perchée dans une des fameuses petites rues de Valparaiso. Parce que c’est pour ça qu’on est venus là. Pour les petites rues en pente, parfois très en pente, les maisons colorées, souvent très colorées, dont les murs sont ornés de street art bariolé, carrément très bariolé. 9 personnes sur 10 qui sont allées à Valparaiso vous chanteront sur tous les tons combien ils sont tombés sous le charme de la ville, de son port entouré de 42 cerros couverts de maisons multicolores donc, de son côté arty, bohème, de ses ruelles entortillées et de ses petites places ombragés et bien sûr, de ses ascensores, ces petits funiculaires qui vous hissent sur les hauteurs de la ville si vous êtes une trop grosse feignasse pour grimper (ou que vous avez acheté 6 packs de lait au supermercado). 9 personnes sur 10. Je suis la dixième. Alors non, j’ai pas détesté Valpo, j’ai juste pas très bien compris pourquoi la ville est inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco. Certes, les maisons sont peintes de couleurs vives et c’est parfois joli, parfois moins joli, le fouillis des petites rues qui grimpent a son charme et il y a bien un bon million de peintures murales parfois drôles, parfois bizarres, parfois très réussies mais clairement, mon p’tit cœur ne s’est pas décroché. Beaucoup de bâtiments sont désaffectés, croulants voire franchement en ruines et puis on fait tout un foin de la maison de Pablo Neruda (pour les incultes, un extrêmement célèbre poète chilien très engagé qui a eu un Prix Nobel de Littérature et qui a été ambassadeur du Chili en France dans les années 70 après s’être présenté puis retiré en faveur d’Allende à l’élection présidentielle de l’année précédente) qui est censée être extraaaaordinaire et que franchement, j’ai trouvé sympa mais pas de quoi tomber par terre. Bref, on s’est quand même baladés toute la journée sous un grand soleil, du marché au sommet des cerros, du port aux grandes avenues, des cementerios à la Sebastiana, on est même tombés sur une manif de journalistes qui râlaient parce qu’ils n’avaient pas été augmentés depuis 14 ans (OK, motif validé) mais même la vue sur la baie et le Pacifique noyés dans la brume (c’est de la brume, hein, bien sûr, c’est pas de la pollution…) n’a pas réussi à nous emballer. Moralité, au lieu de rester 2 jours à Valpo comme initialement prévu, on est partis le lendemain matin, direction La Sereña, 450kms au nord, toujours dans un bus grande classe…
Photos ici.
Et Moai ! Et Moai ! Et Moai !
Après ces 2 premiers jours au Chili, j’ai déjà repris le chemin de l’aéroport, direction l’île de Pâques. Comme le vol est à 8h et qu’à cette heure-là, le métro de Santiago n’est pas ouvert, j’ai donc commandé un taxi. Alors déjà, tu ne descends pas dans la rue attendre ton taxi. Non, non. Tu attends sagement dans l’hôtel que la compagnie appelle pour donner le numéro de la plaque d’immatriculation de la voiture au malheureux veilleur de nuit que tu as tiré de son sommeil et quand il a bien tout noté, il te dit de descendre. Evidemment, tu as commandé ton taxi à 6h et il n’arrive qu’à 6h20 mais il te dit : « Tinquiète, à cette heure-ci, y a personne, je vais rouler comme un malade et tu seras à l’heure ! » et toi, tu réponds : « Euh… si ! No problemo ! » parce que de toute façon, ton espagnol ne te permet pas de dire autre chose…
Bref, 5 heures de vol plus tard, en collant mon nez au hublot, j’ai enfin aperçu mon confetti au beau milieu de l’océan. Et je me suis dit : « Bah dis donc, c’est pas le moment de se faire une appendicite… ». Quelques minutes plus tard, je posais les pieds sur l’île la plus isolée du monde et j’étais accueillie avec un collier de fleurs par Mauricio. Après avoir récupéré tous ses nouveaux clients, chargé tous les sacs à l’arrière de son pick-up brinquebalant et réparti tout le monde dans les 2 autres voitures, Mauricio nous a emmené jusqu’au camping Mihinoa, où j’ai décidé de prendre mes quartiers pour la semaine. Car oui, je suis là pour la semaine. Non pas qu’il y ait vraiment de quoi s’occuper toute une semaine mais j’ai décidé de faire une pause. Des vacances dans les vacances en quelque sorte.
(NDLR : le camping Mihinoa est l’hébergement le moins cher de l’île et de loin. Pas obligé d’y « camper », ils ont aussi des lots en dortoir et des chambres. Marta, Roger et Mauricio sont très sympas et peuvent louer des voitures pour 30 000 pesos la journée, un prix imbattable sur l’île. Les salles de bain et la cuisine sont propres, les lits faits tous les jours et ils proposent même un service de laverie. Mis à part la présence de bons gros cafards bien dodus, rien à dire, c’est parfait. Mais pour les cafards, ils n’y peuvent rien, l’île en est infestée, faut prendre sur soi.)
1er jour : Mon estomac criant famine, ma première mission a été de partir faire les courses. On est sur une île donc à la base, tout est cher. Mais quand on est sur l’île la plus isolée du monde, tout y est encore plus cher. Pas question donc de passer son temps dans les petits restos du bord de mer. 1/ J’ai pas les moyens, et 2/ de toute façon, y a pas non plus pléthore desdits restos. D’après mon ami le Lonely, il devait y avoir 2 supermarchés dans la rue principale d’Hanga Roa. Soyons francs, je n’ai jamais réussi à définir ce que le Lonely considérait comme un supermarché sur cette île. Par contre, j’ai bien trouvé 5 ou 6 épiceries dont les rayons évoquaient clairement l’Allemagne de l’est dans les années 50 et à force de persévérance, j’ai fini par mettre la main sur un paquet de pâtes et une boîte de sauce tomate. A peine le temps de rentrer à la maison que la pluie se mettait à tomber me coinçant là pour le reste de l’après-midi. Heureusement, le camping est face à la mer, le spectacle des vagues venant se fracasser sur les rochers était donc encore bien plus beau bien au chaud avec une tasse de thé.
2ème jour : Après une grasse matinée bien méritée (quoi ? je suis crevée moi, je me déplace tous les jours depuis bientôt 8 mois, je me lève avec les poules, je crapahute, je crapahute… j’ai bien le droit à une grasse mat’, non ? et puis, de toute façon, je vous demande pas votre avis, je fais que ce que je veux, d’abord…) et comme le soleil est revenu, je décide d’aller visiter le Museo Antropologico, histoire de ne pas aller voir les Moai complètement inculte. Le musée est tout petit mais très bien fait et expose les différentes théories qui expliquent le pourquoi du comment de toutes ces statuettes. Une fois que tu as bien tout lu, selon ton degré de fantaisie, tu peux décider de croire celle que tu veux. Je profite aussi de mon petit tour en ville pour passer au Information Center où la fille m’explique où il faut aller pour le coucher du soleil, où il faut aller pour le lever du soleil, où sont les sentiers de randonnée et quel spectacle de danses traditionnelles il faut aller voir. Bref, la tête pleine d’infos et les mains pleines de brochures, je suis rentrée faire la sieste (quoi ? non, je n’ai pas à me justifier). Entre temps, la cargaison du jour des explorateurs de l’île de Pâques est arrivée et je retrouve donc Carmen et Miki qui ont décidé eux aussi de venir s’installer au camping. En fin de journée, j’arrive quand même à me traîner jusqu’à l’Ahu Tahai où je regarde patiemment le soleil se noyer dans l’océan juste derrière les Moai (comme les 50 autres touristes dont 70% de Français qui sont là). C’est bôôôôô… C’est un de ces moments qui me rappellent pourquoi je suis partie. Pour en prendre plein la tête. Et là, assise sur un caillou devant mes nouveaux copains Moai, le bruit des vagues, les ombres qui s’allongent, le ciel qui prend des teintes de cartes postales… c’est que du bonheur.
3ème jour : L’île de Pâques et sa piste d’atterrissage pour navettes spatiales se prêtent à une activité rigolote : le plane spotting. Keskecéssa le plane spotting ? Et bah, c’est quand t’es un peu geek et que tu répertories le nombre, le genre et les spécificités des avions qui atterrissent et qui décollent d’un aéroport. Bon, là, c’est pas bien difficile, y a qu’un vol par jour, c’est toujours la même compagnie et elle envoie toujours le même avion. Non, le véritable intérêt, c’est que la piste d’atterrissage démarre juste au bout de l’île et que si tu te trouves au bon endroit au bon moment, l’avion te passe tellement au ras des cheveux que tu peux faire coucou au pilote. J’ai donc décidé d’aller jouer à ça. Et j’ai convaincu Carmen, Miki et Marie (une autre Française arrivée la veille) de venir avec moi. Sauf que. Aujourd’hui, ce stupide avion a décidé d’atterrir une heure trop tôt et c’est au moment où on part pour l’aéroport qu’on le voit arriver… Tant pis, qu’on se dit, on le verra demain ! Du coup, on part visiter le village cérémoniel d’Orongo, perché sur le bord du cratère du Rano Kau, un des 3 volcans qui forment l’île. La grimpette au sommet du volcan est un peu laborieuse (rappelez-moi pourquoi on a décidé d’y aller à midi déjà ?) mais de là, la vue sur l’île est imprenable et quand on arrive enfin au sommet et qu’on passe la tête par-dessus le bord du cratère… wow ! on reste bouche bée. Le cratère est immense et le fond est rempli d’eau et partiellement couvert de roseaux. Im-pre-ssio-nnant ! Perché sur le rebord du cratère et au-dessus d’un falaise qui fait pas moins de 300 mètres de haut, se trouve donc le village cérémoniel d’Orongo. Après que les Rapa Nui ont décidé d’arrêter de sculpter des Moai (cette religion leur coûtait beaucoup trop cher en arbres et en cailloux et les Rapa Nui sont des gens pragmatiques), ils ont changé de religion pour adopter le culte de l’homme-oiseau. Chaque année, chaque tribu envoyait son champion à Orongo. De là, les types plongeaient dans l’océan et nageaient jusqu’au Motu Nui (un petit îlot juste devant) où il fallait chercher le premier œuf d’un pauvre petit piaf qui passait par là. Celui qui rapportait l’œuf devenait sacré (et comme à tous les gens sacrés, il lui arrivait des trucs bizarres, genre il ne pouvait pas se laver les cheveux jusqu’à l’année suivante) et le chef de sa tribu devenait le chef de toutes les tribus. Jusqu’à l’année suivante où on remettait le couvert. Bref, la visite du village est surtout impressionnante parce qu’on se demande comment les types plongeaient dans l’océan sans se tuer et la vue est simplement fantastique.
Du coup, après tant d’efforts, j’ai redégringolé la colline et j’ai profité de la fin d’après-midi et du bruit des vagues depuis la terrasse.
4ème jour : Aujourd’hui, on a décidé de louer une voiture pour faire le tour de l’île. Carmen, Miki, Marie, Christophe (un autre de nos colocataires) et moi montons donc à 6h30 dans notre bolide pour aller assister au lever de soleil à l’Ahu Tongariki. Alors, certains ont fait la fine bouche mais moi, je le dis, c’est juste ma-gni-fi-que ! Le soleil n’est pas exactement dans l’axe des Moai à cette période de l’année mais n’empêche, ça vaut vraiment le coup. On avait ensuite décidé d’aller prendre le petit déj à la plage. LA plage. Anakena, ça s’appelle. De toute façon, c’est pas compliqué, y a qu’une plage sur cette île. Et il y a bien quelques cabanes qui vendent de quoi se restaurer un peu mais apparemment, on est hors-saison et quand on arrive, l’endroit semble abandonné. Du coup, on décide d’aller juste chatouiller les moustaches des Moai qui se trouvent là puis de vérifier par nous-mêmes que le sable de la crique d’à côté, Ovahe, est bien rose comme le dit la légende. Et puis, on retourne à Hanga Roa pour se mettre quelque chose sous la dent. Sauf que c’est dimanche. Et comme partout en dehors des grandes mégalopoles de ce monde, le dimanche… tout est fermé. On arrive quand même à se dégoter quelques sandwiches bien tristounets et on se dit que puisqu’on est là, on va aller les manger au bout de la piste de l’aéroport pour assister à l’atterrissage du vol du jour. Sauf que. Aujourd’hui, y a du vent. Et au bout d’une heure d’attente, on en vient à la conclusion que l’avion a bien atterri, mais de l’autre côté de la piste et nous, bah…, on l’a loupé.
Du coup, on reprend la voiture et on part explorer la côte sud-est de l’île. Tout le long de la côte s’égrènent les Moai, les pétroglyphes et les sites sacrés. On finit en beauté avec le Rano Raraku, le volcan dans lequel les Rapa Nui taillaient les Moai. Un genre de carrière en quelque sorte. On ne sait pas bien pourquoi mais il semblerait que du jour au lendemain, les Rapa Nui aient arrêté de tailler leurs statuettes et ils ont tout laissé en plan. Du coup, le site est plein de Moai à moitié finis qui émergent du flan du volcan. C’est assez surréaliste et… wow ! f***ing awesome ! comme dirait quelqu’un que je connais.
Après tout ce paquet de Moai assis, debout, couchés, on est rentrés à la maison juste à temps pour le coucher du soleil et on a fini la soirée à papoter autour d’une petite bouteille de vin.
5ème jour : Comme la journée d’hier a été particulièrement intense (quoi ? j’ai vu le lever ET le coucher du soleil et j’ai pas fait la sieste, si ça, c’est pas du programme chargé, je vous demande bien ce que c’est !), je décide qu’aujourd’hui, je vais faire… rien ! Je pars quand même me poster au bout de l’aéroport 1h30 avant l’heure prévue et j’attends sagement, les yeux rivés vers le ciel. Deux heures plus tard, Carmen me rejoint et m’annonce que l’avion a bien atterri mais de l’autre côté… Encore raté ! Du coup, on part déjeuner dans un petit resto qui surplombe le port (enfin le port… j’me comprends…) où après tous ces repas de pâtes, je m’offre un festin de ceviche avec même un peu de coriandre fraîche sur le dessus. Mmmmh ! Et puis histoire de ne pas gagner le titre de feignasse internationale, je pars faire un tour en ville où j’en profite pour réserver une balade à cheval pour le lendemain, faire poser sur mon passeport le fameux tampon Isla de Pascua et manger une glace (quoi ? non, je n’ai toujours pas besoin de me justifier) avant de revenir, exténuée, faire la sieste. Hé ! quoi ? on a dit que c’étaient les vacances, non ?
6ème jour : Pantu doit passer me chercher ce matin à 9h30 pour aller faire une balade à cheval. Pantu, c’est le propriétaire des chevaux. Sauf qu’à 9h, le ciel déjà bien gris devient noir et des trombes d’eau se mettent à tomber. Du coup, je demande à Mauricio d’appeler Pantu et de voir s’il est possible de reporter notre rendez-vous au lendemain. Pantu doit se dire lui aussi que passer 3 heures sous la pluie battante, c’est pas bien fun parce qu’en 2 minutes, l’affaire est réglée, on remet au lendemain.
La pluie ne s’arrête quasiment pas de la journée. Juste quelques minutes pour nous laisser le temps d’aller acheter des œufs et de la farine. On décide donc de s’occuper comme tout le monde lors d’un samedi pluvieux de novembre (parce que ça ressemble vraiment à ça), Carmen fait des gâteaux et on installe un ordinateur dans le salon pour regarder un film. On décide quand même de braver la pluie après le dîner pour aller voir un spectacle de danses traditionnelles. Moi, ça me fait penser un peu aux danses maories. En tout cas, les costumes des danseurs sont très chouettes. On manque juste se faire dévorer par le chien des Baskerville sur le chemin du retour. Mais à part ça, c’était vraiment sympa.
7ème jour : Ce matin, de gros nuages bouchent encore l’horizon mais comme c’est mon dernier jour sur l’île (bah oui, les vacances sont bientôt terminées !), je prends mon courage à 2 mains et je grimpe dans la Jeep de Pantu qui est passé me chercher. Pantu parle espagnol, rapa nui, 3 mots d’anglais et 2 mots de français mais avec de grands gestes et une bonne dose de sourires, on arrive à peu près à se comprendre. Il me présente mon fidèle destrier du jour, Pinaro, un petit cheval qui a l’air de préférer brouter des fleurs que filer au triple galop. Moi, ça me va parfaitement. Alors on part tous les 2, direction le sommet de l’île. Pinaro se révèle être une vraie feignasse et je passe mon temps à lui botter les fesses pour le faire avancer. Mais visiblement, moi, j’ai pas la technique. Parce que dès que Pantu prononce son nom, le cheval dresse les oreilles et part au petit trot. La vue depuis le sommet du Maunga Terevaka (attention, 511m, ça rigole pas) est fantastique. A 360 degrés, c’est l’océan, l’océan, rien que l’océan. Par contre, le vent souffle hyper fort et même les chevaux ont du mal à avancer. Alors après une petite pause photo syndicale, on repart dans l’autre sens, traversant de grandes étendues d’herbes où broutent des vaches et des chevaux sauvages. En passant, je me demande même s’il n’y a pas plus de chevaux que d’hommes sur mon confetti… Après 3 heures passées à se tanner le cuir sur le dos de Pinaro, Pantu me redépose à la maison et dès l’instant où j’essaye de m’asseoir sur une chaise, je réalise que la vie de cow-boy n’est clairement pas faite pour moi… J’ai maaaaaaaal… Alors comme c’est encore couchée que ça passe le mieux, j’opte pour une dernière sieste avant d’assister à mon dernier coucher de soleil pascuan.
8ème jour : Ce matin, après une semaine à éparpiller mes affaires un peu partout, il faut à nouveau reboucler mon sac. On apprend alors que mon vol, initialement prévu à 13h, est retardé à 15h30. Mais comme ici, rien ne se passe comme ailleurs, l’aéroport fonctionne tout de même selon les horaires prévus et on doit aller enregistrer nos bagages à 11h… va comprendre ! Du coup, à midi, je me retrouve devant l’aéroport sans savoir trop comment occuper mon temps quand tout à coup, je me dis que si j’ai encore une chance de voir atterrir ce stupide avion, c’est maintenant. Alors après m’être empiffrée de pulpo al olivo, je vais me poster au bout de la piste, je sors mon appareil photo et fébrilement, j’attends. Et à 14h pétantes, je le vois enfin, passer au-dessus de l’île, décrire un grand demi-tour, revenir vers moi en piquant du nez et dans un vacarme assourdissant, me frôler le dessus du crâne… wow ! décoiffant !
Comme c’est dans cet avion que je dois repartir, je reprends donc le chemin de l’aéroport et à l’heure dite, je quitte mon confetti, et dans un dernier salut aux Moai, je reprends la direction de Santiago.
Photos ici.
Ola Isla de Pascua !
Au moment de tracer l’itinéraire de ce voyage, je ne sais pas pourquoi, je n’ai pas choisi d’aller à Tahiti, aux Fidji, ou sur un de ses petits archipels paradisiaques qui parsèment l’Océanie. En fait si, je sais pourquoi. Les plages de sable blanc qui coule entre vos orteils bordées d’une rangée de cocotiers et le long desquelles déroulent des vaguelettes turquoise dans lesquelles frétillent des raies manta, c’est joli mais faut dire ce qui est, au bout de 48 heures, on s’y emm… Si. C’est vrai. OK, peut-être au bout d’une semaine seulement. Alors je me suis dit, puisque tu vas au bout du monde, va donc faire un tour à l’île de Pâques ! Ah… l’île de Pâques, l’endroit le plus isolé de la terre, dont l’île la plus proche est à 2 000kms et la ville la plus proche à près de 4 000kms… et où il y a plus de Moai que d’habitants ! Et puis soyons honnêtes, si j’y allais pas maintenant, il est clair que je n’y serais jamais allée. Alors j’ai dit « Banco ! » (non, je crois que je l’ai pas dit) et j’ai rajouté un saut à l’île de Pâques dans les billets d’avion.
Je sais pas pour vous mais pour moi, l’île de Pâques, c’était juste un micro confetti posé quelque part dans le Pacifique qu’on voit à la télé dans les documentaires du commandant Cousteau avec des statuettes aux longs nez posées dessus et personne capable d’expliquer ce qu’elles font là. La vérité… c’est tout à fait ça. Mais laissez-moi quand même vous raconter ce qu’on sait, for sure, à propos de l’île de Pâques.
D’abord ça s’appelle l’île de Pâques parce que le petit futé de néerlandais, un amiral du nom de Roggeveen, qui a découvert l’île en 1722 s’est pointé le matin du dimanche de Pâques. 1/ Il avait pas beaucoup d’imagination, et 2/si vous voulez mon avis, il n’a absolument pas tenu compte de la ligne de changement de date et y a fort à parier qu’en fait, on était déjà lundi ou encore samedi… Il a eu un sacré coup de chance notre ami l’amiral parce que l’île, elle ne fait pas plus de 117km², c’est vraiment un confetti, tellement que quand tu es à un bout et que tu te retournes, tu vois l’autre. Bref, quand il est arrivé sur l’île, il a découvert que quelques tribus vivaient là, que ces gens avaient eu l’idée exotique d’élever des plateformes face à la mer sur lesquelles ils avaient élevé des statues qu’ils appelaient Moai, de tailles variées mais avec toutes le même sourire figé (on peut carrément dire qu’ils tirent la tronche). La population de l’île était alors estimée à 15 000 personnes et tout le monde vivait plutôt en bon voisin. Le rapport de Roggeveen indiquait qu’il n’y avait aucune installation moderne (pour l’époque, hein, on se comprend) sur l’île et qu’a priori, c’était la première fois que les insulaires avait un contact avec le reste du monde.
Ce n’est qu’en 1774, soit 52 ans plus tard, autant dire que pas grand-monde se souvenait du Néerlandais, que notre ami James Cook, qui décidément n’en rate pas une, est allé lui aussi faire un petit tour à Pâques. Il avait dû se passer des trucs entre temps parce que beaucoup de Moai gisaient face contre terre ou avaient été endommagés. Ce coup-ci, on a soupçonné des guerres tribales.
Enfin, en 1788, c’est La Pérouse (qui ne possédait pas encore d’usine à sucre en poudre) qui est venu faire son inspection et lui, il a trouvé que la population était plutôt prospère et sereine ce qui laisse supposer qu’à leur manière, ils avaient fumé le calumet de la paix.
Pas de bol pour les Rapa Nui (oui, parce qu’en fait, l’île, elle avait déjà un nom, Rapa Nui mais le Néerlandais n’avait pas pris la peine de demander), c’était la fin de la récré. Finies les petites guerres tribales tranquilles dans son coin, l’heure de la mondialisation avait sonné.
D’abord, en 1862, des négriers vinrent embarquer un bon millier d’habitants pour les réduire au travail forcé dans les mines de guano de Chincha, au Pérou. Je m’imagine bien, moi, je suis une Rapa Nui en train de danser tranquillou devant mes Moai et hop ! 3 types m’embarquent pour me forcer à mettre les mains dans du caca d’oiseau dans un trou à des milliers de kilomètres de chez moi. Je crois que j’aurais pas aimé… Bon, l’Eglise catholique trouve ça moyen-moyen. Alors elle met la pression et elle demande qu’on ramène les gens chez eux. Les négriers (qui doivent avoir 2 ou 3 trucs pas nets sur la conscience et qui ont peur de finir en enfer) capitulent et ramènent les survivants sur un petit bateau, normal, ils sont 15. En plus, ceux qui sont revenus ont propagé une épidémie de variole manquant exterminer ceux qui étaient restés. Tout contents de leur succès, des missionnaires viennent évangéliser ce qui reste de la population dans la foulée. Et puis en 1870, l’aventurier Jean-Baptiste Dutroux-Bornier (c’est quand même moins cool que Bob Morane comme nom pour un aventurier) décide de coller tout ce petit monde au commerce de la laine parce que les moutons se plaisent bien sur l’île. Mais comme un mouton, ça n’a pas tellement besoin qu’on le surveille, il envoie plein de Rapa Nui filer un coup de main dans les plantations de Tahiti (en même temps, c’est quasiment l’archipel le plus proche). Du coup, les missionnaires ne sont pas contents. Parce que eux, ils préfèrent envoyer les gens aux îles Gambier. Bref, ça se chamaille et Bob Morane finit assassiné.
En 1888, le Chili décide que Pâques, c’est chez lui (rappelez-vous, on en a parlé ici). Mais bon, c’est quand même pas la porte à côté (Santiago est à 3 700kms) et puis des Rapa Nui, il n’en reste que 111 (oui, beau boulot messieurs les mondialisateurs !) alors l’île est cédée à une compagnie anglaise spécialisée dans la laine qui fait office de gouvernement et qui parque les habitants dans le seul village, Hanga Roa, avec interdiction de mettre les pieds dans le reste de l’île. Sympa. Evidemment, les Rapa Nui n’ont pas la citoyenneté chilienne, pas le droit de vote, pas le droit de quitter l’île, bref, très sympa. Et cette situation dure jusqu’en 1964. Là, quand même, on finit par leur attribuer au moins la citoyenneté chilienne. Et puis 3 ans plus tard, quand le premier vol commercial atterrit en provenance de Santiago, c’est le début de l’ère touristique. Détail amusant, dans les années 1970, la NASA a subventionné l’agrandissement de la piste de l’aéroport Mataveri pour créer un terrain d’atterrissage d’urgence pour les navettes spatiales. La piste est aujourd’hui une des plus longues du monde. Aujourd’hui, il y a un vol par semaine qui relie Santiago à Tahiti en faisant escale sur l’île et un vol quotidien entre Santiago et l’île, transbahutant environ 65 000 touristes par an. C’est pas le Pérou mais ça permet aux habitants de rester vivre sur l’île et aujourd’hui, Hanga Roa abrite environ 5 000 Rapa Nui. L’île a également acquis le statut de territorio especial depuis 2008. Ça veut dire qu’elle bénéficie d’une plus grande autonomie que les autres départements chiliens mais l’indépendance n’est pas encore à l’ordre du jour.
Voilà. Maintenant qu’on est incollable sur l’île de Pâques, allons donc chatouiller les moustaches des Moai !
C’est un fameux trois-mâts…
Quoi ? Me faites pas croire que vous n’avez jamais fait l’erreur ! Moi, je viens juste de découvrir que le bateau en question ne s’appelle pas du tout SantiaGo mais SantiaNo… Avouez que ça prête à confusion. En même temps, j’aurais dû m’en douter, y a pas la mer à Santiago.
Bref, reprenons. Une fois passée la douane (je pourrais avoir la photo de Mickey sur mon passeport, ça leur ferait même pas lever un sourcil), et un bus et 2 changements de métro plus tard, je sors de terre au beau milieu de la Plaza de Armas, au cœur de la ville. Mon hostal est juste là, au dernier étage d’un immeuble qui borde la place et depuis la terrasse, je découvre les environs.
Bon, bah, à première vue, c’est grand, c’est plein d’immeubles, ça grouille de gens et y a une bonne couche de pollution qui cache les montagnes autour mais ça n’empêche pas le soleil de passer à travers. La place est un immense carré bordé d’immeubles blancs et jaunes de 5 à 6 étages et de la grande cathédrale de la ville, la cathédrale de l’Assomption de la Très Sainte Vierge (parce qu’apparemment, des fois, elle est juste sainte et des fois, elle est très sainte, va comprendre pourquoi). Au milieu de tout ça, des enfants courent, des hommes orchestres dansent, des cercles se forment autour de passionarias qui haranguent la foule, les terrasses des cafés sont pleines, on entend les gens rire, crier, les pigeons volent… ça vit quoi !
Tout ce que j’ai entendu sur Santiago, c’est que c’est moche et que ça ne vaut pas le coup de s’y attarder. Moi j’ai 48 heures à y passer et je suis bien décidée à me faire ma propre opinion. Alors même si la vue est plaisante, je ne passe pas toute l’après-midi à lézarder sur ma terrasse. Non, non. Je saute dans la douche (après une journée de 41 heures, c’est pas du luxe) et je rejoins le Free Tour Santiago qui démarre juste au pied de la cathédrale. En voilà une idée qu’elle est bonne ! Deux fois par jour, des guides emmènent les touristes faire le tour de la ville en anglais. Gra-tui-te-ment. Bien sûr, on vous suggère de donner un pourboire mais curieusement, il semblerait qu’on soit bien plus enclin à rémunérer un guide quand on sait que ça n’a rien d’obligatoire… Moi, mon guide s’appelle Felipe, il a un accent formidable et surtout, plein d’adresses hyper intéressantes à recommander (comme ce glacier à l’angle de la Plaza Italia ou ce resto fréquenté par les locaux et où le patron n’essaye pas de vous arnaquer au Mercardo Central). Il nous raconte des tas de trucs rigolos comme ces cafés spécialisés dans le coffee with legs, où les serveuses ont des jupes extra courtes et où, il y a encore quelques années, existaient des happy minutes. Pendant une minute, on baissait le rideau de fer, les serveuses offraient un strip-tease express aux cols blancs qui étaient en train de boire leur café puis on relevait le rideau et tout le monde faisait comme si de rien n’était. Intéressante tradition. A mi-parcours, il nous emmène boire un café à la terrasse d’un petit bar sympa. Un café ou un Pisco sour, LA spécialité d’Amérique du sud. Keskecé le Pisco sour ? Et bien, c’est une bonne dose de pisco (de la liqueur de raisin), du sucre, un peu de blanc d’œuf pour rendre le tout un peu plus smooth et un trait de citron vert. Bref, ça se boit comme du p’tit lait et ça fait causer. Du coup, je discute avec Carmen et Miki, un couple suisse-allemand très sympa, qui commence un tour du monde d’un an. Pour l’instant, ils n’ont visité que l’Argentine et ils prennent l’avion dans 2 jours pour aller… à l’île de Pâques ! Après avoir dit au-revoir à Felipe, on va donc dîner tous les 3 dans un des restos de la rue Constitucion dans le barrio Bellavista, le quartier de Santiago réputé pour sa vie nocturne animée. L’occasion de goûter un Pastel de Choclo, une des spécialités nationales, une espèce de ragoût avec du poulet, du bœuf, plein de sauce, quelques olives, le tout recouvert de purée de maïs… Mouais, je sens déjà que je vais regretter mes soupes de nouilles dans pas longtemps. Puis, comme je compte bien profiter pleinement de cette journée fantastiquement longue, on va goûter quelques-unes des centaines de variations de mojitos et de caïpirinhas qui font la réputation du coin. Le petit détail qui nous ramène à la réalité c’est quand à peine assis en terrasse, le serveur du bar vient fixer nos sacs à nos chaises avec des lanières de façon à ce qu’ils ne s’envolent pas tout seuls… Ça met tout de suite dans l’ambiance.
Et puis, comme les Chiliens ne sont pas des gens qui se couchent tard, le métro s’arrête à 22h, ce qui nous oblige à prendre un taxi pour rentrer. Le chauffeur essaye de nous convaincre d’aller à la soirée organisée pour fêter on sait pas trop quoi dans une discothèque un peu plus loin mais toutes les bonnes choses ont une fin, même cette journée exceptionnelle.
Le lendemain matin, j’ai rendez-vous pour le petit-déj avec un copain que je n’ai pas vu depuis près de 6 ans et qui est de passage à Santiago pour le boulot. Bah oui, tout le monde ne vient pas à Santiago en touriste, il semblerait qu’il y ait encore des gens qui bossent. Sauf que ce matin, c’est le 1er mai. La journée internationale des feignasses. Encore plus vrai ici où le premier café n’ouvre laborieusement qu’à 10h (on est les premiers clients, affamés) et où les rues sont désertes de chez désertes. Au hasard des rues, on arrive jusqu’au palais de la Moneda où on assiste à la relève de la garde. Moi, ça me rappelle les evzones d’Athènes sauf qu’ici, ils ont remplacé les jupettes et les bas en laine par des belles bottes cirées et des costumes vert olive. Et puis, comme tout (vraiment tout) est fermé, on décide d’aller voir la ville d’en haut. D’abord au Cerro Santa Lucia puis au Cerro San Cristobal où se trouve le sanctuaire de la Vierge de l’Immaculée Conception. Pour grimper tout là-haut, on peut se la jouer warrior et y aller en courant, ou, faire comme tout le monde et prendre le funiculaire. Bon, il se trouve qu’il y a une queue pas possible au funiculaire parce qu’il mène aussi au zoo de la ville qui est visiblement la seule chose d’ouverte aujourd’hui. Mais arrivé au sommet, la vue sur la ville est… époustouflante. On voit bien la petite couche de brouillard qui recouvre l’ensemble mais au-dessus, on voit les montagnes. La Cordillère des Andes ! Et pas à 200kms ! Non, non. Juste là, aux portes de la ville. On en reste sans voix. Beaucoup de Chiliens viennent ici déposer des fleurs ou se recueillir et plein de gens ont à la main un verre avec un contenu étrange… Comme il faut vivre dangereusement, on tente le coup. Et on se retrouve avec une portion de blé recouverte de pêches au sirop… Curieux. Pas dégueu mais curieux. On finit par redescendre de notre colline (à pied cette fois parce qu’on est à moitié courageux) pour atterrir dans un resto de fruits de mer, toujours dans le barrio Bellavista, mais cette fois, j’opte pour un ceviche, du poisson cru mariné au citron. Bonne pioche, c’est délicieux. Et puis on papote, on papote, on laisse filer l’après-midi et on décide d’aller admirer le coucher de soleil depuis la terrasse du bar de l’hôtel W, un des grands hôtels de Santiago. Bonne idée mais quand on arrive… le bar est fermé pour travaux. Du coup, on se rabat sur le lounge de l’hôtel où après quelques Pisco sour (chilean style et peruan style), on finit par commander à dîner parce que ça faisait au moins 3 heures qu’on avait rien avalé… Pas mal. Pas mal du tout.
Et puis, cette fois, je ne laisse pas filer le dernier métro et je rentre boucler une fois de plus mon sac parce que demain, c’est lever à 5h30 pour filer au beau milieu de l’océan : direction Isla de Pascua !
Finalement, Santiago, c’était pas si mal. J’y aurais presque passé une journée de plus histoire de traînasser dans quelques musées et de boire quelques cafés hyper sucrés en terrasse. La prochaine fois !
Photo ici.
Lost in translation
Ce matin, quand le réveil sonne, je sais que j’ai une longue journée devant moi. Loooooongue. Ma journée à moi, aujourd’hui, elle va durer 41 heures. Notez bien ça : le 30 avril 2013 aura duré 41 heures…
En fait, depuis le début de ce voyage, je saute d’un fuseau horaire à l’autre sans trop m’affoler. J’en étais quand même arrivée à avoir 10 heures d’avance sur vous, là-bas, à la maison. Quand vous alliez vous coucher, j’étais en train de prendre mon petit-déj du lendemain. Et au Chili, c’est l’extrême inverse qui m’attend : 6 heures de retard sur vous, j’irai me coucher quand vos réveils vous tireront de vos couettes (à peu de choses près).
Bref, tout ça pour dire qu’aujourd’hui, pendant que vous vieillirez selon le cours normal du temps, je rajeunirai de 17 heures…
Voilà le programme : aujourd’hui, après un premier vol Christchurch – Auckland prévu à 10h30, je vais monter dans l’avion pour Santiago à 16h. Après 12 heures de vol, j’atterrirai à Santiago du Chili et il sera… 11h du matin mais toujours le 30 avril. Je vais monter dans la DeLorean, Philéas Fogg n’a qu’à bien se tenir !
Bien. Sauf que. Comme d’habitude, tout ne se passe pas exactement comme prévu. Quand j’arrive à l’aéroport de Christchurch, mon vol est retardé. De 3 heures !!! Ce qui ne va me laisser plus qu’une heure pour récupérer mon sac, changer de terminal, ré-enregistrer mon sac et grimper dans l’avion suivant. Jouable mais risqué. D’autant plus risqué que le vol Auckland – Santiago fait partie du Round The World ticket et que si je le loupe, ça annule tous les suivants (et évidemment, il n’est pas question de remboursement). Alors, je prends mon air le plus aimable et détendu et je m’approche du guichet. Là, il y a une petite dame, très gentille, à qui je demande si elle sûre, SÛRE, SÛRE DE CHEZ SÛRE que le vol ne va pas être encore plus retardé. Evidemment, elle ne sait pas, elle ne peut pas me garantir que tout va se passer comme prévu vu que ça déconne déjà. Je lui explique que j’ai une connexion à faire, moi et qu’il faut absolument que je sois dans ce deuxième avion, no matter what. Alors comme elle est très gentille, elle me dit qu’il faut que je patiente un peu mais qu’elle peut peut-être me transférer sur un autre vol qui va partir dans 1 heure… T’inquiète que j’ai été sage comme une image ! Je me suis assise sur mon sac juste devant son guichet et j’ai même pas cligné des paupières pendant la demi-heure suivante. Et quand elle m’a fait signe de venir la voir, j’ai bondi et je lui aurais presque claqué 2 bises bien sonores si on n’avait pas été séparées par le comptoir.
Bon, mon nouveau vol prévu à 9h05 n’est parti qu’une heure plus tard mais peu importe. J’étais à Auckland, dans le bon terminal, les yeux fixés sur l’écran qui affichait le vol pour Santiago. Un seul vol pour l’Amérique du sud sur toute la journée, y avait donc vraiment pas moyen de ne pas monter dedans. Sauf que du coup, j’étais tellement en avance que l’enregistrement des bagages n’était même pas ouvert. J’ai donc encore poireauté par terre, assise sur mon sac pendant 2 bonnes heures avant de pouvoir me débarrasser de mon paquetage de 21kgs. 21kgs ! Parce que oui, on en est là maintenant ! Le plus étrange, c’est que je n’ai pas prévu de me séparer de grand-chose dans les semaines qui viennent…
Bref, il était temps d’accomplir mon rituel d’adieu et de dévorer un bon gros burger bien gras chez mon ami McDo avant d’aller faire la sieste patienter dans la salle d’embarquement. C’est là que ça a commencé. D’abord tout doucement. Juste une dame qui est venue me demander si… hablas español ? Ouh, mon dieu, non ! Pas un mot, ma bonne dame ! Et après, c’est devenu un festival. Les hôtesses qui font les annonces en espagnol, tous les passagers qui papotent en espagnol, les consignes de sécurité en espagnol, les films même pas sous-titrés en espagnol… j’ai pas encore quitté la Nouvelle-Zélande que je m’y crois déjà. Et je ne comprends rien. Je ne comprends même pas que l’hôtesse me propose des raviolis au fromage ou un poulet aux champignons… L’enfer… Allez, un vaso de vino blanco por favor ! Va bien me falloir ça !
12 heures plus tard, après avoir survolé rien de moins que la Cordillère des Andes (les Andes !!! non, mais sans blague, c’est pas le Massif Central, hein ! Les Andes !!!) et traversé le nuage de pollution qui recouvre la vallée, me voilà à Santiago. Une heure plus tard, je mets enfin le nez hors de l’aéroport et je me remplis les poumons de l’air de ce nouveau continent… et j’éternue ! Wow, fini l’air pur et le ciel bleu fluo, bonjour les gaz d’échappement et le ciel blanc (on voit même pas les montagnes autour et pourtant, elles sont vraiment pas loin). Biologiquement, pour moi, il est 4h du matin. En vrai, il est midi, pas question de dormir avant un bon moment. Alors, attaquons Santiago !
Photos ici.