D’après vous, à quoi peut bien ressembler l’aéroport international de Luang Prabang ? A une bicoque avec un toit de temple et 2 salles, une « Arrivées » et une « Départs » et entre les 2, un petit guichet avec un type en uniforme qui joue avec 3 tampons ? Bah oui. C’est ça. C’est aussi clafi de moustiques. Genre entêtés les moustiques. Mais bien sûr, ils ont affaire à plus coriace qu’eux.
Arrivée à la nuit tombée, je sais pour une fois précisément combien il fait (« Welcome to Luang Prabang airport. The outside temperature is 29°C… ») et je découvre la ville depuis la fenêtre du taxi collectif qui me dépose devant ma guest house. Ça a l’air bien plus vivant que ce que j’ai traversé jusqu’à maintenant au Laos et puis, y a plein de petits lampions, toutes les terrasses des restos sont en bois, c’est tout mignon, bref, c’est la Hoi An du Laos. Impression confirmée par ma première visite au night market où s’alignent les stands de grillades et les buffets de nouilles mais où les seuls Laotiens sont derrière les stands. En fait, le night market s’étend tout le long de l’artère principale de la ville rendue piétonne pour la soirée et s’adresse uniquement aux touristes. On peut y trouver tous les souvenirs « classiques » et le marchandage, obligatoire, se fait sur calculette histoire d’éviter les malentendus. Mais c’est assez sympa d’y flâner et de goûter quelques spécialités comme la saucisse de buffle ou des petits gâteaux à la noix de coco tout chauds.
Pour commencer mon séjour à Luang Prabang, j’ai décidé d’aller visiter les grottes de Pak Ou à quelques kilomètres au nord. Pour se rendre à Pak Ou, il faut prendre un long tail boat (une longue barque pas bien large) et remonter le Mékong pendant 2 bonnes heures (le courant est assez fort). Et puis, faut revenir. En fait, la balade est presque plus intéressante que la visite des grottes en elles-mêmes qui ne dure que 40 minutes et où y a pas grand-chose à voir à part des centaines d’effigies de Bouddha installées dans la falaise. Mais le Mékong est toujours aussi joli et on fait coucou aux Laotiens qui pêchent, jardinent ou font leur lessive le long des berges.
En rentrant, je traverse une des petites passerelles de bambou qui enjambent la Nam Khan (l’autre rivière qui passe à Luang Prabang) à la saison sèche (à la saison des pluies, le courant est trop fort et les passerelles sont démontées) et je vais déjeuner dans un des petits restos qui regardent tranquillement couler l’eau en laissant filer les heures les plus chaudes. Et puis, je me balade dans la ville, plutôt calme en journée, et je découvre ses jolis bâtiments coloniaux et ses temples à chaque coin de rue. Il faut dire que Luang Prabang est classée au patrimoine mondial de l’Unesco. Alors les autorités prennent tout projet de construction ou de rénovation très au sérieux et pour une fois, on apprécie le souci de l’esthétique. L’ambiance de la ville est détendue, les gens sont aux terrasses des cafés, jouent à la pétanque (appelée ici « pétang » et un vrai sport national) et on entend les cris des enfants qui jouent dans les cours d’écoles. C’est plutôt agréable, ce semblant d’urbanisation après quelques semaines dans la cambrousse. Et pouvoir commander un Iced Latte Macchiatto et se faire servir un Iced Latte Macchiatto (et pas un éternel café chaud au lait concentré même si le serveur a dit « OK, OK ! »), ça s’apprécie aussi.
Pour finir cette première journée, je m’inscris à un cours de cuisine. Bon. Pas la meilleure expérience en la matière que j’ai eu jusque là. Déjà, la patronne (américaine) m’arnaque de 10 euros sur le prix du cours : elle me fait payer 260 000 KIP et quand je m’aperçois que les autres participants n’ont payé que 160 000, je vais réclamer mais elle dit ne pas m’avoir fait payer 260 et que j’ai dû me tromper… Mouais… Ça commence mal. Ensuite, le cours n’est pas vraiment un cours mais la démonstration ultra rapide de 4 plats (dont un qui consiste à faire bouillir des légumes pour les tremper dans une sauce tomate). Il faut ensuite en choisir 2 qu’on réalise soi-même en suivant le bouquin de recettes pendant que les « profs » discutent dehors… On termine par la dégustation de nos plats et à 19h30, faut débarrasser la place parce que les profs veulent fermer la boutique. Pas vraiment enthousiasmant. Mais au moins, on repart avec les recettes en poche et je peux maintenant vous promettre une soupe de poissons tout à fait délicieuse sur le buffet du AL’s barbeuk.
Le lendemain, je me consacre à la culture. Enfin, le matin. Après avoir englouti une demi-baguette au Nutella au marché (oui, ils vendent des baguettes au Nutella au marché, c’est comme ça, moi, je consomme local, c’est important), je commence par un musée ethnologique sur les différentes minorités du Laos (qui s’avèrent être sensiblement les mêmes qu’au Vietnam et au Cambodge mais après tout, les frontières administratives n’ont jamais empêché les gens de se déplacer n’est-ce pas ?), puis je vais me recueillir devant un grand Bouddha couché et enfin admirer la vue sur Luang Prabang et ses environs depuis le mont Phu Si (attention, 100 mètres d’altitude, une vraie colline !). Quand je redescends, il fait bien trop chaud pour continuer à arpenter la ville. Alors je rentre me mettre au frais à la guest house. Et là, c’est le crash. La chaleur, les piqûres de moustique et mes expériences culinaires un peu hasardeuses des derniers jours ont raison de moi et la petite sieste réparatrice se transforme en 5 longues heures de sommeil de plomb. Bon. Bah oui. En voyage, chaque jour n’est pas forcément une aventure et quand la flemmite aiguë attaque, des fois, tu as beau essayer, tu peux pas résister. Alors passer la soirée à lire les news people sur internet ou regarder toutes les paires de chaussures en soldes que tu ne vas pas acheter, ça te ne fait pas culpabiliser. Ça permet juste de redémarrer en pleine forme le lendemain.
Bien. Parce que le lendemain, c’est le dernier jour à Luang Prabang. Et qu’un des « must see » ici, c’est la procession des moines à l’aube qui viennent demander l’aumône. Ça s’appelle le Tak Bat. Les moines représentent 10% de la population de la ville et ils n’ont pas le droit de travailler. L’aumône est donc leur seul moyen de subsistance. Au petit matin, alors que le soleil est sur le point de se lever, les moines parcourent la ville en silence en tendant leurs petits paniers. Les gens leur donnent de la nourriture selon un rituel assez précis : il faut porter une écharpe sur l’épaule gauche, ne pas avoir de contact physique avec les moines et pour les femmes, être assise ou accroupie pour être plus bas qu’eux. Tout ça est censé être un peu mystique. Les touristes peuvent assister à la cérémonie à condition de respecter 2 ou 3 règles de base (ne pas mitrailler les moines, ne pas gêner la procession, être habillés décemment, ne pas faire de bruit). Sauf que. Luang Prabang est touchée par le syndrôme dit « de Varanasi ». En fait, les touristes viennent prendre en photos d’autres touristes qui jouent à donner l’aumône et qui se sont fait arnaquer par des vendeuses ambulantes qui leur ont vendu du riz de mauvaise qualité. Et au moment où les premiers moines font leur apparition dans la rue, tout le monde court et s’agglutine autour d’eux, n’hésitant pas à braquer les téléobjectifs à 3cms de la tête des petits bonzes… Sur 100 personnes donnant l’aumône, 5 étaient de vrais Laotiens qui venaient accomplir un rite religieux ayant une véritable importance. Les autres ? Des touristes venus se faire prendre en photo. Les gens s’interpellent, se poussent… bref, l’ambiance n’est pas vraiment au recueillement. Et une fois la procession passée, tout le monde se disperse en vérifiant qu’il a bien LA photo qui fera un bon fond d’écran… Autant vous dire que j’ai détesté. Pourtant, même le Lonely Planet mettait en garde mais ça aurait été dommage de ne pas venir constater de mes propres yeux à quoi tout ça ressemble.
Comme je me suis levée à l’aube et que tout ça m’a un peu déprimée, je vais m’offrir un petit déj de compét histoire de prendre des forces pour finir mon parcours culturel entamé la veille. Je visite donc une petite dizaine de temples et de monastères, des petits, des grands, des très décorés, des pas du tout décorés, avec des chats dedans, des chiens, des lézards monstrueux, bref, après la collection des cascades, c’est la collection des temples ! Et pourquoi ça autant de lieux sacrés à Luang Prabang ? Bah ça, l’histoire ne le dit pas. Mais c’est plutôt joli. Et puis, je vais aussi admirer LE Bouddha qui a donné son nom à la ville, le Pha Bang, un Bouddha en or arrivé ici en 1512 puis emporté à 2 reprises par les Thaïlandais et finalement restitué au Laos en 1867. Pour abriter le Pha Bang, un grand temple est en construction dans les jardins du Palais Royal (hum, hum, une grande bicoque d’une dizaine de pièces, pas Versailles). D’ici 100 ans (temps qu’il faudra pour achever la construction vu la vitesse à laquelle ça va), on ne sera plus obligés de coller son nez entre les barreaux d’une grille en fer et de plisser les yeux pour apercevoir la fameuse statue dorée mais on devrait pouvoir l’admirer dans un écrin de dorures somptueux.
Et puis pour finir, et sûrement parce que ça devait me manquer, je vais admirer les chutes de Tad Kuang Si. Trois ours en cage gardent l’entrée du parc forestier et c’est tout juste si le monde ne s’intéresse pas plus à eux qu’aux fameuses chutes qui sont pourtant fort impressionnantes.
Voilà, Luang Prabang c’est terminé. C’était chouette. On y aurait bien traînassé quelques jours de plus, juste à regarder couler le Mékong en buvant des fruits shakes à l’ombre des bougainvilliers. Mais ce soir, je grimpe dans le bus pour Vientiane, la capitale du Laos à quelques 350kms plus au sud. 350kms et 12 heures de bus… Et le train me direz-vous ? Ah bah non, M’sieurs-dames, y en a pas de train, au Laos ! Bon… bah, pas le choix alors, hein ! Allez, courage et patience et… en voiture Simone !
Photos ici.